« Ne faites pas rire au point de prêter à
rire ».
- Héraclite d'Ephèse
Au cours du débat des
chefs du 20 mars dernier et de son entrevue du dimanche 23 mars à l'émission
"Les coulisses du pouvoir", le Dr Couillard de l'Espinay s'est à
nouveau exprimé sur la question de la laïcité au Québec.
Non seulement le port
du hijab ne le dérange pas (mais alors quel problème pose la burka?), en outre,
ce morceau de tissu ne dérangerait presque personne puisque nulle plainte n'a
été relevée, notamment dans les hôpitaux et les universités. La réponse à ce poncif
simpliste (digne du "Checkers' speech" de Richard Nixon en 1952...)
est pourtant évidente: quel patient, quel étudiant isolé trouvera le temps et
l'énergie pour se lancer dans une pénible… croisade? Quel étudiant va mettre en
péril sa note en affrontant une enseignante hijabée? Et ce n'est pas à
l'urgence de l'hôpital qu'un patient est susceptible de se poser de nombreuses questions
philosophiques sur la neutralité de l'Etat. Dans tous les cas, le citoyen est,
concrètement, captif. Est un pur sophisme l'assimilation d'une résignation
silencieuse et impuissante à l'approbation.
Par ailleurs, le Dr Couillard
de l'Espinay reprend régulièrement le
distinguo -hasardeux- entre le fonctionnaire en position d'autorité et les
autres, fruit des profondes cogitations des professeurs Bouchard et Taylor.
(Au passage, il faut
être d'une ignorance crasse pour ne pas se rendre compte que tout employé de
l'Etat dispose d'un pouvoir coercitif sur les administrés, dont seule l'intensité
est susceptible de varier; par exemple, même le fonctionnaire municipal auquel l'on
demande un permis de rénovation est bel et bien en position d'autorité.)
Elément plus troublant,
au cours du débat, le chef du parti libéral a grossièrement esquivé une
question directe concernant le cas hypothétique de la policière hijabée, alors
que l'on se serait attendu à un refus ferme de cette possibilité. Avons-nous donc
assisté à un revirement?
Il est permis de
penser que le parcours professionnel du Dr Couillard de
l'Espinay jette un trait de
lumière sur ce flou.
En pratique privée, il
n'a pas suivi les traces du Dr Schweitzer.
C'était son droit.
Il n'a pas assumé la
direction de la léproserie de Lambarene, mais a plutôt pris la route du
Moyen-Orient, où il n'a pas non plus consacré ses efforts aux camps de réfugiés
kurdes ou palestiniens; il a plutôt opté pour des fonctions plus prometteuses sur
le plan matériel en Arabie Saoudite, un pays qui n'est pas particulièrement renommé
pour le nombre de ses synagogues ni la rigueur de son système judiciaire pénal.
Enfin, les Saoudiennes n'ont pas la réputation d'amazones.
D'aucuns se sont interrogés,
notamment, sur ses accointances avec la famille royale, mais le Dr Couillard de
l'Espinay a réponse à tout: « C'est un contexte culturel
différent du nôtre. Est-ce que la meilleure approche est le retrait ou le
contact [sic] et le partage [sic] des connaissances? ». On peut tout de même douter
que le Dr Couillard de l'Espinay, à titre de roumi de Cour, ait longuement
sermonné le prince dont il était le conseiller sur les droits de l'homme, et
encore moins de la femme. En l'occurrence, le "partage" fut largement
d'ordre financier et administratif (M. Legault est donc totalement injuste
lorsqu'il traite le chef du parti libéral de simple "médecin"…).
Voilà qui peut expliquer sa réaction indignée au
cours du débat au sujet de la rémunération des médecins québécois, qui seraient
des "boucs émissaires"! On
comprend sa touchante compassion pour ses malheureux collègues qui n'ont pas
tous eu la chance de se faire un bas de laine au soleil du désert.
Soyons justes. En ce
qui concerne les groupes de pression, il n'y a pas que l'ordre des médecins qui
a droit à la sollicitude du chef du parti libéral.
Il persiste, sans
rire, à qualifier les commissions scolaires (qui comptent 4000 membres…)
d'institutions "démocratiques", en dépit d'un taux de participation aux
élections de 7% …
Sinon, doit-on se
réjouir du solide terrain d'entente (au moins un) qui unit le Dr Couillard de
l'Espinay et madame Marois au sujet du projet de cimenterie de Port-Daniel? Une
belle ânerie sur le plan économique (un autre Gaspésia en perspective?) et une
hérésie écologique. Si les usines n'ont pas encore commencé à cracher leurs gaz
à effet de serre, les relents de duplessisme empestent d'ores et déjà
l'atmosphère, vu que ce projet fut présenté par madame Marois comme une
récompense du choix électoral de la population en 2012.
Le Dr Couillard de l'Espinay
sait, en effet, s'occuper de ses vraies affaires (tout comme le Dr Barrette). En
matière de démocratie et de féminisme, il y a des accommodements fort
raisonnables lorsque le chèque de paye -surtout non imposable- est juteux.
L'ex-(?)larbin du
grand vizir Iznogoud a la reconnaissance du ventre, même ici au Québec : vu ses
"liaisons dangereuses", son rejet de la charte de la laïcité, sa
bénédiction à la geôle hijabesque, sans oublier la fatwah dont fut victime
Fatima Houda-Pépin, prennent tout leur sens.
Mektoub.
LP
PS. Détail piquant au sujet des signes
religieux : le Dr Couillard de l'Espinay ne voudrait pas d'une province où Mère
Teresa ne pourrait œuvrer. Voilà qui laisse songeur. Les bonnes œuvres de
celle-ci n'étaient, en substance, que le produit d'une (autre) propagande mythologique
émanant du Vatican. Anjezë Gonxhe
Bojaxhiu était une ordure qui entretenait un... "contact"
assidu avec les dictateurs.