Saturday, July 30, 2016

Hillary fait sauter la banque.

Le 30 juillet 2016.


It’s also that Americans work harder, dream bigger.
- Hillary Clinton.

The business of America is business.
- Dwight D. Eisenhower.

C'est une impressionnante première historique : une femme devient candidate d'un des deux grands partis nationaux à la présidence américaine.

En effet, il a fallu à Hillary Clinton surmonter de nombreux obstacles pour briser le plafond de cristal. On se demande parfois comment cette parfaite outsider a accompli ce miracle d'intégrer le cursus honorum politique à la force du poignet qui l'a amenée au sommet (enfin presque).

She never quits. She never gives up.

La convention démocrate a fait la promotion de valeurs humanistes rafraîchissantes : l'unité et la tolérance, plutôt que la division et le racisme à peine codé promus quelques jours plus tôt à Cleveland.

Comme les orateurs qui l'ont précédée, Hillary a mis dans son discours d'acceptation l'accent sur les visions humanistes : esprit de solidarité, meilleur accès à l'assurance-santé et à l'éducation, affectations de fonds publics dans des infrastructures encore plus utiles socialement que le matériel militaire - n'en déplaise aux actionnaires de Halliburton -,  l'environnement, le rejet de la folie meurtrière de la National Rifle Asssociation, etc. Bref, la version actualisée de la "Great society" de Lyndon Johnson, laquelle, à l'exception de quelques regrettables pointes pro-protectionnistes en matière économique,  oppose le simple bon sens à la vulgarité démagogique.

Pour réaliser ces rêves, tous les espoirs sont permis avec une femme politique qui a participé à un gouvernement qui avalise l'extraction de gaz et de pétrole par fracturation hydraulique, et qui a battu tous les records en matière de répression de la liberté de la presse, qui s'est acharné contre Julien Assange, coupable de lèse-majesté en exposant des faits réels - mais gênants - en invitant instamment les très, très complaisants procureurs suédois à feindre de prendre au sérieux des allégations de viol totalement fantaisistes, et donc à se livrer à une grossière manœuvre consistant à tenter de le ramener sur le sol suédois dans le seul but de l'extrader ensuite vers le donneur d'ordre américain.

(Suite aux révélations concernant les réticences des caciques du parti démocrate quant à la campagne du trouble-fête Bernie Sanders, il est permis de conjecturer qu'une administration Clinton ne sera pas forcément disposée à classer automatiquement sans suite le dossier Assange).

Et les petites gens peuvent-elles imaginer un protecteur du consommateur plus motivé?

Le romantique couple Clinton se fait souvent rémunérer, à l'occasion par les institutions financières de Wall Street, ses conférences d'une ou deux heures par la bagatelle de 200 000$ au minimum (un escompte est parfois accordé aux écoles et universités). Le rêve américain est une réalité, le dur labeur est toujours récompensé : les deux tourtereaux quittent la Maison Blanche dead broke, reprennent courage en relisant leur bible, "Little house on the prairie" et, 15 ans plus tard, les "Ingalls-Clinton", qui ont les deux pieds dans la glaise, ont constitué un joli petit bas de laine de 125 millions de dollars. From rags to riches. Pendant la période du 1er janvier 2014 au 14 mai 2015, monsieur a encaissé 13,5 millions de dollars pour 53 discours, contre 12 millions pour 51 allocutions pour madame. Les chiffres moyens par conférence sont respectivement 250.000 et 235.000 dollars. (Oui, il y a encore du travail sur le plan de l'équité salariale hommes-femmes.)

Michelle Obama a raison : l'heure n'est pas au cynisme. America is now is the greatest country on earth.

(On se souviendra que, au Canada, en sens inverse, les nombreuses conférences souvent consacrées au panthéisme de Spinoza d'un autre outsider, un certain Justin Trudeau, ont fait un tel tabac qu'elles lui ont permis de mettre un peu de beurre sur les épinards et de sortir de l'anonymat auquel sa naissance le vouait de prime abord.)

Without a glass ceiling, the sky is really the limit. She never quits. She never gives up.

On peut penser qu'Hillary a toutes les chances de réaliser son vieux rêve : en janvier, enfin dormir dans le lit présidentiel.

LP

Sunday, July 24, 2016

Donald Trump : Amerika, Amerika über alles!

Le 24 juillet 2016.


Le singe piétine à mort tout primate qui ne fait pas partie de sa communauté. Ce qui vaut pour les primates vaut aussi pour les hommes !
- Adolf Hitler.

It's morning again in America.
-Ronald Reagan.

C'est fait : Donald Trump est le candidat officiel du parti républicain à la présidence des Etats-Unis et son long discours d'acceptation, prononcé dans une salle où prédominaient les têtes blondes, fut instructif.

On a affaire à un orateur messianique, vociférant, aux poumons d'airain, dont l'éloquence agressive s'inscrit dans une tradition qui a fait ses preuves au siècle dernier. Sa gestuelle rappelle étonnamment (?) un éminent homme d'Etat d'origine autrichienne, tandis que ses moues pendant les pauses sont semblables à celle d'un politicien italien de la même époque se revendiquant de la grandeur de la Rome antique.

Le fond, lui, est original.

Le pays est au bord de l'apocalypse, mais il promet de le nettoyer, dresse une équation entre immigrés (surtout appartenant à des religions non-chrétiennes, du jamais vu, bien sûr) d'une part et criminalité et chômage d'autre part, et d'adopter une politique économique protectionniste, on ne peut mieux symbolisée par l'érection d'un mur le long de la frontière mexicaine. Enfin, il sera sans pitié pour les politiciens qui poignardent dans le dos les défenseurs de la patrie et la privent de la victoire : pas de réédition du traité de Versailles de 1919.

Il annonce les couleurs : il sera le président de la loi et l'ordre, et l'Amérique retrouvera le paradis perdu des années 50, dépeint à la télévision dans, par exemple, "Father knows best" et "Leave it to Beaver", des chefs d'oeuvre de "cinéma vérité" avant la lettre. Sans oublier qu'il abolira l'assurance-maladie instaurée par l'imposteur kényan Barack Obama, de sorte que tous les Américains, peu importe leur couleur ou leur état de fortune, auront, à partir de janvier 2017, accès aux soins médicaux personnalisés prodigués jadis par les "Dr Kildare" et les "Marcus Welby, MD".

(Dans ces séries télévisées quasi-documentaires, les disciples d'Esculape avaient une compassion particulière pour les toxicos, les mineurs aux poumons encrassés par la poussière de charbon et les patients atteints de cancer colorectal en phase terminale; ils n'avaient pas leur pareil pour traiter les morsures de rats subies par les enfants de 5 ans souffrant de malnutrition habitant Watts, et cautériser les chairs déchirées des gamines de 11 ans originaires de Louisiane violées à répétition par leurs oncles, cousins et pasteurs pentecôtistes (pas forcément dans cet ordre)).

Tout y est. Le décor est planté.

Le candidat Trump a même déjà sa milice : la National Rifle Association. Sur laquelle on peut compter pour régler les vrais problèmes.

Le visionnaire Trump ne saurait donc de s'abaisser à réfuter les théories fantaisistes sur les causes des maux de l'Amérique selon lesquelles les lois antidrogues américaines seraient à l'origine de la violence régnant au sud du Rio Grande et donc la cause directe de l'émigration des Mexicains; pire, elles auraient nourri la violence en transformant les ghettos noirs, où ne sévissait "que" la pauvreté, en mini-foyers de guerre civile sans issue, et il faudrait y ajouter les séquelles de l'esclavage qui n'a commencé à s'alléger qu'en 1965. Bref, le candidat du parti de Lincoln n'a que faire de ceux qui attribuent la responsabilité du triste état de l'Amérique à une société blanche dominatrice qui préfère, depuis un petit demi-millénaire, investir dans les prisons plutôt dans que les écoles et les hôpitaux ouverts à tous, et qui osent voir dans la NRA la seule organisation djihaddiste en activité sérieuse à l'heure actuelle aux Etats-Unis (ce qui n'est pas très sérieux : les 32 000 morts victimes d'armes à feu chaque année sont une broutille en comparaison aux 60 000 soldats tombés en 10 ans de Vietnam).   

Au jour d'aujourd'hui, il faut avoir des priorités : les rafles des Latinos qui soutiennent l'agriculture et l'industrie hôtelière américaines, leur bouclage dans des camps de regroupement et leur expulsion, surtout qu'ils ne trompent personne en affichant insolemment en matière de criminalité des chiffres inférieurs à ceux des Américains de naissance.

America first.

Reprenant l'idée centrale du colonel Kurtz dans "Apocalypse Now", le fondateur de la Trump University promet de résoudre - lui seul peut le faire - les problèmes de l'Amérique quickly, fast. L'ordre sera vite rétabli car les ennemis de l'Amérique connaîtront… the horror, the horror… Oui, on peut le croire, d'autant plus qu'il tient en haute estime un autre apôtre de la démocratie participative à l'helvétique, le président russe Poutine, notamment, on le suppose, pour ses conceptions en matière de maintien de l'ordre.

Believe me, believe me.

Pour autant, le propriétaire de la Trump Tower a peut-être porté un subtil message à son auditoire à la conclusion de son allocution, lorsque l'on a entendu les Rolling Stones chanter : "You can't get always what you want…"

LP


Friday, July 22, 2016

Le 22 juillet 2016. Les tas d'urgences.



Il n'y a pas de bonne blessure pour le droit : toutes sont mortelles.
- François Mitterrand (Le coup d'Etat permanent).


La France et la Turquie se ressemblent de plus en plus.

Les autorités se proclamaient déjà unilatéralement historiens : dans celle-ci, il est interdit d'évoquer le génocide arménien, dans celle-là, est réprimé le délit de négationnisme de l'holocauste.

Et voilà que, presque simultanément, il y a quelques jours, la France décide de prolonger l'état d'urgence suite à l'attentat de Nice, la Turquie de le proclamer suite à une tentative de putsch.

On s'étonne cependant des mises en garde qui lui sont adressées par de nombreux Etats, notamment, précisément, la France, relativement à la considérable purge en cours décidée par le président Erdogan. De prime abord, ces mesures drastiques s'imposaient d'autant plus qu'il est censé avoir échappé de peu à la mort, déplore au moins 265 morts et surtout, que le fonctionnement même de ses institutions était en péril imminent, conditions non réunies en France. Mais rassurons-nous. Il est impossible de mettre en doute la bonne foi d'un homme d'Etat démocratiquement élu, qui donne sa parole que ces mesures sont tout simplement destinées à assurer le respect de la démocratie et non pas de lui nuire. Ces soupçons de détournement d'une situation de crise à des fins bassement politiciennes sont de très mauvais goût.

Chose certaine, on constate, en temps réel, que les droits publics turc et français tendent à converger harmonieusement.

Cela dit, est-ce la France qui est un exemple pour la Turquie, ou, à l'inverse, est-ce le calife Erdogan qui est l'exemple que suivent le grand Mamamouchi François Hollande et son grand vizir Manuel "Iznogoud" Valls? Dans un cas comme dans l'autre, une belle émulation. Evidemment, il est exclu que le chef de l'Etat français porte un jour le fez ou le keffieh qui dissimulerait sa chevelure soigneusement coiffée et teinte.

Est ressuscité l'esprit, sinon la lettre, de l'alliance franco-ottomane conclue par le roi François Ier et Soliman le Magnifique en 1536.

La preuve est faite que la Sublime Porte défend des valeurs on ne peut plus compatibles avec celles des pays membres de l'Union européenne et qu'elle a donc vocation à en devenir membre à part entière.

LP

Sunday, July 17, 2016

Le 18 juillet 2016. "The world is undoubtedly safer with Saddam Hussein gone…"



Il fallait décidément s'habituer à cette idée qu'aucun peuple n'était à l'abri des séductions de la force et des pratiques de l'arbitraire.
- François Mitterrand.

In the councils of government, we must guard against the acquisition of unwarranted influence, whether sought or unsought, by the military-industrial complex. The potential for the disastrous rise of misplaced power exists and will persist. We must never let the weight of this combination endanger our liberties or democratic processes. We should take nothing for granted.
- Dwight D. Eisenhower.

Il y a quelques jours à peine, l'ex-roi fainéant, George Dubya Bush, reprenait ce sinistre refrain, rapport Chilcot oblige.
                               
Suite à l'invasion de l'Iraq par les troupes commandées par la société Halliburton, l'Etat islamique est né des cendres de ce pays en décomposition, notamment avec la participation d'anciens cadres du dictateur déchu : il fallait bien qu'ils fissent leur reconversion professionnelle. C'était prévisible : une fois réduits au chômage et hébergés dans les prisons halliburtiennes, ils ont su les utiliser à leur profit comme lieux de socialisation et ont pu se constituer un réseau fondé sur leurs compétences professionnelles respectives pour développer de nouvelles entreprises. La création de Daech Inc. a été facilitée par les foires d'emploi établies par l'occupant américain.

Pour trouver des associés d'affaires compatibles et aux qualifications complémentaires, Abou Ghraib valait mieux que toutes les petites annonces.

Voilà ce qu'on appelle faire preuve de résilience quand les conditions évoluent.

Depuis, le califat autoproclamé occupe une substantielle partie de la Syrie et de l'Iraq, et ses récents revers sur le terrain semblent plus modestes que ce que prétend une certaine propagande. Par contre, les spectaculaires attaques qu'il commandite se multiplient dans le monde : en Europe, en Iraq, en Turquie, au Bangladesh… même s'il privilégie, pour l'instant, la formule du franchisage plutôt que les succursales, en lançant ses invitations au meurtre rituel trop bien entendus par les psychopathes de la planète. L'effet publicitaire est le même.

On ne peut qu'être impressionné par la réactivité de toute la classe politique française, qui n'a pas perdu une minute pour instrumentaliser la tragédie de Nice et intensifier la panique. Le président Hollande, lui, encore aux commandes pour quelques mois au moins, a opté - surprise - pour la reconduction de l'état d'urgence pour encore trois mois… En l'annonçant directement à la Nation, il crevait l'écran grâce à son impeccable coiffure, mais cette mesure, aux relents politiques, purement illusoire sur le plan policier et qui ne trompera que qui veut, sera éventuellement bien utile à l'exécutif, par le truchement d'une magistrature et des forces de l'ordre sachant à l'occasion faire preuve de complaisance, pour bâillonner les contradicteurs.

Les actionnaires d'Halliburton sont unanimes : la bizenaisse scoule de l'université Harvard ("MBA", trois lettres magiques qui mènent à tout…) peut s'enorgueillir de compter parmi ses anciens élèves la… mère fondatrice de Daech & Co., Dubya, qui fut engrossée par Dick Cheney.
                                 
L'odieux attentat perpétré dans la baie des anges par Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, dont la première victime fut une Musulmane religieuse, est la plus récente gracieuseté sortie de leurs entrailles.

LP

Saturday, July 9, 2016

Le 9 juillet 2016. Le Tartuffe négationniste anglais.



Je crois parce que c'est absurde.
- Paroles apocryphes attribuées à Saint-Augustin et à Tertullien.

Le jugement sera sans miséricorde pour celui qui n’aura pas fait miséricorde.
- Jacques 2:13.

Cry 'Havoc!', and let slip the dogs of war.
- Shakespeare.

Au Royaume (encore -Uni), Sir John Chilcot vient de rendre public son accablant rapport concernant la participation du Royaume-Uni à l'invasion de l'Iraq. Pour mémoire, elle fut décidée, en 2003, sur le fondement des grossières fabrications de Dick Cheney, PDG, dans une très récente vie antérieure, de la société Halliburton, une dynamique entreprise pétrolière et de bâtiments-travaux publics devenue cette année-là - le hasard fait bien les choses - un important fournisseur du gouvernement américain.

En substance, il est reproché à l'ancien premier ministre Tony Blair d'avoir joué les chambellans obséquieux en adhérant à cette hasardeuse opération commerciale. Ce dernier a réagi en exprimant, avec des soupçons de sanglots et des bris de voix habilement modulés, ses regrets concernant les "erreurs" commises (il est passé maître dans l'art de l'understatement…) et sa compassion envers les familles comptant des militaires morts au champ d'horreur, mais affirmant toujours sa bonne foi, soutenant avoir agi en fonction des éléments d'information alors disponibles, alors qu'il est bel et bien établi qu'ils étaient, au mieux, fantaisistes, même à l'époque, et que la messe était de toute manière dite auparavant : "I will be with you, whatever" roucoulait-il naguère à George Dubya Bush… L'amour est aveugle…

Comme on pouvait s'y attendre, Mr. Blair occulte aussi les vraies questions en se rabattant, sans rire, sur la thèse portant que le monde est quand même plus sûr depuis l'élimination de l'allié d'hier Saddam Hussein, lui qui, au moins, contrôlait les fondamentalistes. (Le recours à ce leurre est fréquent depuis la mise à mal de l'évident mythe des armes de destruction massive, et il vient d'ailleurs d'être repris par le roi fainéant Dubya). Vu que l'effondrement de l'Iraq a eu pour conséquence directe la création de Daech, faut-il y voir une touche d'humour noir, très flegmatiquement anglais?

"Cachez cette guerre que je ne saurais voir".

Ont peu de chances d'être entendus les appels aux poursuites pénales visant le majordome Blair pour crimes de guerre, même s'ils sont compréhensibles, d'autant plus qu'il déclare que, au final, si c'était à refaire, il agirait de la même manière... En matière de contrition, on a vu mieux.

Rappelons cependant que Anthony Charles Lynton Blair, grand mystique religieux devant l'Eternel, après avoir quitté la vie politique, a quitté la communion fondée par Henri VIII pour devenir officiellement membre de l'Eglise de Rome, une démarche spirituelle prévisible vu qu'il assistait assidument à la messe catholique depuis de nombreuses années - déjà en 2003…- sans oublier son subtil jésuitisme et sa propension à faire siennes les fables pieuses.

On ne saurait donc trop lui recommander des rencontres fréquentes avec son directeur de conscience au cours des années qui lui restent de son séjour terrestre, car, en l'état, il est probable que, dans l'autre monde, un comité d'accueil s'apprête à lui souhaiter la bienvenue, et le conduire manu militari vers la marmite à usage de longue durée déjà astiquée qui lui est personnellement destinée.

LP


Tuesday, July 5, 2016

Le 5 juillet 2016. Prochaine dégradation des libertés publiques en France.



La vérité historique est souvent une fable convenue.
- Napoléon.

Propaganda is to democracy what violence is to dictatorship.
- Noam Chomsky.

Il est dangereux d’empêcher la liberté de la recherche et il est préférable d’affronter les négationnistes dans un combat d’idées.
- Claude Liauzu.

La France vit une effervescence pré-électorale.

Moins d'un an avant les élections présidentielles, le gouvernement accorde à ses fonctionnaires quelques chiches augmentations. Mieux, elle fait à la population des petits cadeaux fiscaux, qui lui permet de récupérer en partie ce qui lui a été ponctionné depuis 2012…

Dans cette veine, on aurait cru que la secrétaire d'État à l'Égalité réelle (foin de l'égalité fictive!) Ericka Bereigts, aurait fait de l'égalité devant l'impôt une priorité et donc consacré ses énergies à concocter une législation visant mieux, par exemple, les paradis fiscaux, mais il y avait plus urgent socialement.

Elle fait en grande pompe la promotion d'une loi dans laquelle d'aucuns peuvent voir un nouveau coup porté à l'Etat de droit en France, qui n'avait vraiment pas besoin de ça, surtout en cette période d'état d'urgence. Seul était réprimé jusqu'à présent le délit de négationnisme de la shoah. On ratisse désormais plus large : est adopté à l'unanimité par l'assemblée nationale un amendement - très gouvernemental - au projet de loi "Égalité et citoyenneté" (rien que ça), qui assortit de sanctions pénales la contestation ou la banalisation de l'ensemble (vraiment?) des crimes contre l'humanité, dont l'esclavage et le génocide arménien. Rappelons que, en ce qui concerne ce dernier, l'ex-président Sarkozy avait déjà essayé de s'offrir les voix caucasiennes en 2012, mais que sa loi fut censurée par le Conseil constitutionnel.  

Le gouvernement actuel remet ça et Madame Bereigts explique donc onctueusement que ne seront visés cette fois-ci, subtil distinguo, que les crimes reconnus par une juridiction ou, s'ils sont trop anciens, lorsqu'ils disposent d’une reconnaissance historique (!) et les contestations ou banalisation commises "dans des conditions incitant à la haine ou à la violence". On espère donc que, par cette grossière manœuvre, le conseil constitutionnel n'y verra - si l'on ose dire - que du feu, et ne constatera cette fois nulle atteinte à la liberté d'expression!

Pour autant, on a d'une part, une petite idée, depuis l'affaire Dreyfus, de la valeur très relative des constats de fait des magistrats français; a fortiori, on sait à quoi s'attendre lorsque ceux-ci, et les législateurs, excèdent leur champ de compétence en jouant les historiens : l'Inquisition.("Chacun son métier, les vaches seront bien gardées"). D'autre part, ce pseudo-garde-fou, qui permet tous les abus, comme le confirme l'application de son inspiratrice, l'infâme loi Gayssot, qui ne fait rire personne, et surtout pas les chansonniers.

Voilà donc une réforme juridique qui tirera de l'oisiveté les procureurs et juges d'instruction de la république qui, comme chacun le sait, n'ont pas assez de trafiquants de drogue et d'armes à feu, de pollueurs industriels et agricoles, d'escrocs, et de fraudeurs fiscaux à se mettre sous la dent. (Encore qu'ils font déjà des efforts louables pour se tenir un peu plus occupés en instrumentalisant les lois pour harceler les Dieudonné, les Eric Zemmour et… les Patrick Sébastien, et en détournant allègrement les lois antiterroristes pour faire du chiffre, comme l'illustre l'affaire Tarnac).

De prime abord, on pourrait soupçonner le président de la République de vouloir jouer les papes, en imposant ex cathedra une doctrine historique élevée au rang de dogme sacré. En l'occurrence, allons plus loin. Il suit plutôt l'exemple du calife régnant à Ankara : en effet, il y a égalité… réelle entre la loi française qui interdit la contestation du génocide arménien, et la loi turque qui interdit d'en faire état. Une évidence élémentaire, mais qui échappe au grand Mamamouchi François Hollande et son grand vizir Manuel "Iznogoud" Valls; une forme de négationnisme de la réalité qui correspond, comme par hasard, comme en 2012, au compte à rebours électoral.

Toutefois, tout n'est pas perdu pour la liberté de parole en France.

La loi Taubira ne dénonce, sélectivement, que la traite négrière pratiquée par les occidentaux blancs et chrétiens et est muette sur le juteux commerce de viande humaine auquel se sont livrés les Arabes musulmans : il s'agissait de ne pas heurter la sensibilité des jeunes issus de l'immigration maghrébine… En outre, les crimes staliniens et maoïstes ne semblent pas avoir fait l'objet d'aussi bruyants rappels, législatifs ou judiciaires.

Que l'on se console donc. Même si les sénateurs, décident de céder au démagogique chant pré-électoral des sirènes, adoptent à leur tour le projet de loi "Égalité et citoyenneté" amendé, et même si, au final, le Conseil constitutionnel choisit de tomber dans le piège tendu - issue probable vu le recours, par l'exécutif, à la ficelle Gayssot  - et d'aval-iser ce jus de guano législatif, il subsistera quand même un salutaire espace de contestation, non passible du bûcher, ou de fatwah, comme on voudra.

LP

Sunday, July 3, 2016

Le 3 juillet 2016. Elie Wiesel est décédé.

L'oubli signifierait danger et insulte. Oublier les morts serait les tuer une deuxième fois. Et si, les tueurs et leurs complices exceptés, nul n’est responsable de leur première mort, nous le sommes de la seconde. 


Un prophète de la paix vient de quitter un monde qui reste en flammes.

LP