Friday, December 5, 2014

Le 5 décembre 2014. Michaëlle Jean dirigera l'Organisation internationale de la francophonie.


Il est bon de suivre sa pente, pourvu que ce soit en montant.
- André Gide. 

Paris vaut bien une messe.
- Henri IV.

Madame Jean est une communicatrice hors-pair.

Elle a toujours su injecter dans ses discours, journalistiques et politiques, des trémolos et une pointe de mélodrame savamment dosés. La nouvelle secrétaire générale de l'OIF n'a pas déçu.

Une fierté pour le Canada? Nul doute. Mais, ces jours-ci, on évoque également les attaches françaises et haïtiennes de la nouvelle secrétaire générale. Françaises? Faut-il conclure que madame Jean a, discrètement, obtenu des autorités françaises sa réintégration?

On se souviendra qu'après avoir opportunément renoncé à ses convictions souverainistes québécoises, quelques jours avant d'assumer ses augustes fonctions vice-royales de gouverneur-général du Canada, elle a renoncé à la nationalité française. En effet, d'aucuns voyaient dans cette double appartenance une source potentielle de conflit d'intérêts pour la future commandante-en-chef des forces armées canadiennes.

Rideau Hall valait bien un accommodement raisonnable : le sacrifice d'un passeport.

Incidemment, il semble que détenir la nationalité haïtienne ne posait aucun problème. Cela est sans doute logique, puisque la notion d'"Etat haïtien" était (et demeure largement) un oxymore. En outre, on ne saurait nier que les perspectives d'affrontement nucléaire étaient nettement plus fortes avec la France qu'avec l'ex-perle des Antilles.

Au Canada, cette controverse n'avait rien de nouveau.

Alors qu'il était chef du parti libéral du canada, Stéphane Dion a dû faire face aux quolibets émanant d'un certain Canada, où l'on ne concevait pas un premier ministre canadien ayant aussi la nationalité française. M. Dion aussi a aussi démontré être une personnalité accommodante : c'est d'un ton veule, trahissant une colonne vertébrale sinon inexistante, certainement d'une plasticité remarquable, qu'il finit par déclarer, en désespoir de cause, être disposé à renoncer à la nationalité française si cela posait vraiment problème (sans préciser à qui…), au lieu d'invoquer, avec la fermeté qui s'imposait en l'occurrence, l'exemple d'un ancien chef de son propre parti et ex-premier ministre du Canada, John Turner, dont la naissance, au Royaume-Uni, d'un père anglais, n'a jamais donné lieu à quelque controverse que ce soit.

En ce qui concerne le chef de l'opposition au Parlement, le Québécois anglophone Thomas Mulcair, les choses se sont, heureusement, plus sereinement passées.

Y aurait-il, à l'occasion, deux poids, deux mesures, en matière de double nationalité au Canada? (Pour Stéphane Dion, la question n'est probablement plus d'une brûlante actualité).

Au Québec, Philippe Couillard de l'Espinay, baron de Jersey, a pu se faire élire premier ministre sans que nul ne lui eût fait grief de sa nationalité française. Il en ressort que ses administrés constituent bel et bien une société dont certains éléments sont distincts. En outre, l'autre lien national du féal sénéchal d'Ottawa n'a, in fine, rien de répréhensible : il y donne entière satisfaction et n'a, forcément, pas d'aspirations politiques pancanadiennes.

Ironie de l'histoire, c'est au Sénégal que Michaëlle Jean vient de se faire conférer sa nouvelle mission. Un pays dont le premier président, Léopold Sédar Senghor, a conservé la nationalité française jusqu'à son dernier souffle.

Un intéressant exemple d'apôtre de la francophonie.

LP

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