Il est bon de suivre sa pente, pourvu que ce soit en montant.
- André Gide.
Paris vaut bien une messe.
- Henri
IV.
Madame
Jean est une communicatrice hors-pair.
Elle a
toujours su injecter dans ses discours, journalistiques et politiques, des
trémolos et une pointe de mélodrame savamment dosés. La nouvelle secrétaire générale de
l'OIF n'a pas déçu.
Une fierté
pour le Canada? Nul doute. Mais, ces jours-ci, on évoque également les attaches
françaises et haïtiennes de la nouvelle secrétaire générale. Françaises? Faut-il
conclure que madame Jean a, discrètement, obtenu des autorités françaises sa
réintégration?
On se
souviendra qu'après avoir opportunément renoncé à ses convictions
souverainistes québécoises, quelques jours avant d'assumer ses augustes
fonctions vice-royales de gouverneur-général du Canada, elle a renoncé à la
nationalité française. En effet, d'aucuns voyaient dans cette double appartenance
une source potentielle de conflit d'intérêts pour la future commandante-en-chef
des forces armées canadiennes.
Rideau
Hall valait bien un accommodement raisonnable : le sacrifice d'un passeport.
Incidemment,
il semble que détenir la nationalité haïtienne ne posait aucun problème. Cela
est sans doute logique, puisque la notion d'"Etat haïtien" était (et
demeure largement) un oxymore. En outre, on ne saurait nier que les
perspectives d'affrontement nucléaire étaient nettement plus fortes avec la France
qu'avec l'ex-perle des Antilles.
Au Canada,
cette controverse n'avait rien de nouveau.
Alors
qu'il était chef du parti libéral du canada, Stéphane Dion a dû faire face aux
quolibets émanant d'un certain Canada, où l'on ne concevait pas un premier
ministre canadien ayant aussi la nationalité française. M. Dion aussi a aussi
démontré être une personnalité accommodante : c'est d'un ton veule, trahissant
une colonne vertébrale sinon inexistante, certainement d'une plasticité remarquable,
qu'il finit par déclarer, en désespoir de cause, être disposé à renoncer à la
nationalité française si cela posait vraiment problème (sans préciser à qui…),
au lieu d'invoquer, avec la fermeté qui s'imposait en l'occurrence, l'exemple d'un
ancien chef de son propre parti et ex-premier ministre du Canada, John Turner,
dont la naissance, au Royaume-Uni, d'un père anglais, n'a jamais donné lieu à
quelque controverse que ce soit.
En ce qui
concerne le chef de l'opposition au Parlement, le Québécois anglophone Thomas Mulcair,
les choses se sont, heureusement, plus sereinement passées.
Y
aurait-il, à l'occasion, deux poids, deux mesures, en matière de double nationalité au Canada?
(Pour Stéphane Dion, la question n'est probablement plus d'une brûlante actualité).
Au Québec,
Philippe Couillard de l'Espinay, baron de Jersey, a pu se faire élire premier
ministre sans que nul ne lui eût fait grief de sa nationalité française. Il en
ressort que ses administrés constituent bel et bien une société dont certains éléments sont distincts. En
outre, l'autre lien national du féal sénéchal d'Ottawa n'a, in fine, rien de répréhensible : il y donne entière satisfaction et
n'a, forcément, pas d'aspirations politiques pancanadiennes.
Ironie de
l'histoire, c'est au Sénégal que Michaëlle Jean vient de se faire conférer sa nouvelle
mission. Un pays dont le premier président, Léopold Sédar Senghor, a conservé
la nationalité française jusqu'à son dernier souffle.
Un intéressant
exemple d'apôtre de la francophonie.
LP
No comments:
Post a Comment