Saturday, December 27, 2014

Le 27 décembre 2014. Le pape François dénonce le "fondamentalisme".



En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez pas la Chair du Fils de l'homme et ne buvez pas son Sang, vous n'aurez pas la vie en vous. Qui mange ma Chair et boit mon Sang a la vie éternelle et je le ressusciterai au dernier jour. Car ma Chair est vraiment une nourriture et mon Sang une boisson.
- Jean 6, 53-55.

The worst vice of a fanatic is his sincerity.
- Oscar Wilde.

Le fanatisme est un monstre mille fois plus dangereux que l'athéisme philosophique.
- Voltaire.

Dans une sainte colère, le pontife vient, lors de la traditionnelle bénédiction "urbi et orbi" qu’il a prononcée le 25 décembre, d'exprimer son rejet, notamment, de la "persécution brutale" perpétrée par les djihaddistes (sans évoquer nommément l'"Etat islamique", on reconnaît là le subtil jésuite…) et des exactions pratiquées par les fondamentalistes de Boko Haram au Nigéria.

L'indignation et l'émotion du Saint-Père sont contagieuses.

C'est donc la gorge serrée que l'on attend, dans les prochains jours, son annonce, dans un souci de cohérence, de la dissolution de l'Opus Dei (il faut logiquement conclure que François n'en est plus l'ami) et de la Légion du Christ, toutes deux louées chaleureusement également par l'ex-Grand Inquisiteur Ratzinger, alias Benoît XVI.


Tout discours intégriste, tant religieux que politique, est comme une plante carnivore : il pompe goulûment ses sucs d'abord dans le fertile terreau des textes fondateurs et fondamentaux en version intégrale. En ce qui concerne l'islamisme radical, il puise aussi dans l'épaisse couche de fertilisant fumier que constituent les invasions chrétiennes du Moyen-Orient au Moyen-Age; par conséquent, on attend également le didactique rappel de la condamnation des croisades, qui ont donné lieu - conformément à l'injonction du Christ quant à l'emploi du glaive pour réduire les mécréants - aux joyeux massacres de Musulmans, de Juifs et de Chrétiens orthodoxes (les survivants ont parfois regretté la mansuétude de la domination musulmane) et abouti aux "Etats latins d'orient".

Et pour faire bonne mesure, pourquoi ne pas prendre le 12 décembre comme journée de repentance?

Ce jour-là, en 1098, fut prise Ma'arat par les croisés, qui massacrèrent tous ses habitants, qui avaient pourtant capitulé sur la foi de promesses de vie sauve. Las! Cruelle déception pour ces valeureux combattants du Christ, cette ville manquait de vivres.

A la guerre comme à la guerre : les dépouilles des vaincus finirent donc en plats de… résistance dans leurs écuelles. Il faut savoir faire bouillir la marmite avec les moyens du bord. Et ne dit-on pas que la cuisine est l'art d'accommoder les restes?

Pourtant, quelle émouvante béatitude pour les Ma'aratiens : ils ont donné aux soldats du messie leurs corps et leur sang. Une christique et rédemptrice communion sous les deux espèces. 

Commémorer chaque année cette cène aiguiserait l'appétit des fidèles, qui dégusteraient avec encore plus de gourmandise leur dinde de Noël 13 jours plus tard.

LP

Monday, December 22, 2014

Le 22 décembre 2014. La censure à la française.



What is freedom of expression? Without the freedom to offend, it ceases to exist.
- Salman Rushdie.

Les pensées sont libres, mais on a quand même des ennuis.
- Karl Kraus.

If we don't believe in freedom of expression for people we despise, we don't believe in it at all.
- Noam Chomsky.

En république française, pays de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, Eric Zemmour vient d'être remercié par iTélé après 10 ans de bons et loyaux services. Il n'officiera plus à titre d'animateur (on hésite à parler de "collaborateur") à l'émission "Ca se dispute"… Et sa présence sur les ondes de RTL semble être devenue incertaine.

Voilà le brillant résultat d'une campagne de lynchage médiatique orchestrée par le grand démocrate Jean-Luc Mélanchon - qui se dit incapable de qualifier Cuba de "dictature"- et toutes les bonnes âmes antiracistes, animées par les meilleures intentions du monde, qui réclament, en se frappant vertueusement la poitrine, le boycott d'Eric Zemmour par les médias, tout en se proclamant hérauts de la liberté de parole.

Faut-il s'étonner?

C'est bel et bien en France que fut adoptée, à l'initiative du député communiste (n'est-ce pas) Jean-Claude Gayssot, la loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe, dans laquelle on trouve notamment le très stalinien article 9 réprimant le délit de négationnisme - constitué par la simple contestation de l'existence des crimes contre l'humanité; c'est aussi en France que fut muselé il y a quelques mois un chansonnier aux audacieuses aspirations humoristiques, l'antisémite mulâtre Dieudonné, au terme d'une procédure dont la célérité évoque un tribunal populaire de la révolution… culturelle chinoise. (Un âge d'or). Le juge français est non seulement historien, mais le garant du bon goût artistique.

La France est une grande école primaire, dont les élèves sont soumis à la férule d'instituteurs jansénistes qui savent protéger leurs chers petits des mauvaises influences.

Il y est donc parfois (non, presque toujours) difficile de comprendre ce qui est devenu un truisme dans les pays (civilisés) suivant le droit public anglo-saxon : les putes, les démagogues, les crétins, les ignares, les péquenauds, les limaces, les consanguins, les royalistes, les cathos, les fachos, les cocos, les gauchos, ont (pardon du lapsus, devraient avoir) droit à la pleine liberté de parole. Oui, même quand on semble rêver, sans prononcer le mot magique, en réponse à un journaliste italien, à la "déportation" des Musulmans de France. 

Puisque le mal est fait, Eric Zemmour devrait profiter de l'occasion pour prendre un peu de large et faire sa première visite au Québec : il pourra s'y épancher sur l'épaule de son confrère et lèche-botte, Matthieu Bock-Côté.

Bien sûr, bien sûr, c'est un jour triste pour la liberté d'expression en France. Mais il y a encore plus grotesque, que nul ne semble avoir relevé.

Grâce au soutien de la présidente du Front National, la blonde Marine Le Pen, qui a la mâchoire carrée de son de son ex-para de père, il y a désormais en doulce France un petit juif kabyle basané qui se prend réellement pour un Gaulois blanc, alors  que, contrairement à son compagnon d'infortune, le crépu et lippu clown triste Dieudonné M'bala M'bala, il ne peut même pas revendiquer une mère bretonne.


LP


Friday, December 19, 2014

Le 19 décembre 2014. La terre promise des psy.



Les plus pessimistes sur les hommes sont toujours dépassés par la réalité.
- Robert Brasillach.

On est puceau de l'horreur comme on l'est de la volupté.
- Louis-Ferdinand Céline.

Rien ne ressemble à la vertu comme un grand crime.
- Saint-Just.


La science peut aussi être patriotique.

Sont passés à l'histoire les médecins nazis et leurs recherches sur les cobayes humains d'Auschwitz; les psychiatres chargés jadis de détruire les dissidents de l'ex-union soviétique; en Afrique du Sud, Wouter "Doctor Death" Basson, un expert de la guerre chimique et bactériologique, dont le titre de gloire est d'avoir tenté de développer une bactérie n'attaquant que les noirs.

On déplore, cependant, que ces éminentes personnalités ne semblent pas avoir toujours eu droit à la reconnaissance qu'elles avaient pu espérer.

Même une sommité de la génétique comme Josef Mengele a fini ses jours, sinon dans le dénuement, au moins dans des conditions modestes; les psychiatres russes ont eu droit, à la belle époque, à d'agréables séjours dans les datchas, mais après l'effondrement du communisme, ils ont dû se contenter d'honoraires ordinaires pour diriger de banales psychanalyses. Le grand bactériologiste sud-africain ne semble pas avoir reçu de substantiels appointements pour services rendus, et il a même dû affronter la justice après 1994, même si les procédures n'ont pas abouti à des condamnations jusqu'à présent.

Aux Etats-Unis, par contre, les hommes de science de valeur ont droit à des conditions d'embauche et de retraite plus alléchantes.

Saluons d'abord et surtout la mémoire de Wernher von Braun, et d'autres ingénieurs aéronautiques allemands ayant participé aux programmes V-1 et V-2. Comme un certain nombre de criminels de guerre nazis susceptibles de rendre d'utiles services, ils bénéficièrent de la cécité volontaire de la libre Amérique, laquelle ne leur tint pas rigueur d'avoir conçu les fusées qui causèrent de sérieux dégâts en Angleterre et auraient pu modifier le cours de la guerre. Sans devenir un nabab, von Braun a fait une belle carrière, chez Walt Disney à titre de directeur technique (ses apparitions didactiques sur le petit écran dans le cadre du "Wonderful world of Disney" ont enchanté les petits Américains blonds assoiffés de culture scientifique), et à la NASA.

Rendons aussi hommage au docteur John Charles Cutler qui, pour le compte du United States Public Health Service, a dirigé, de 1946 à 1948, des expériences au Guatemala consistant en l'inoculation de la syphilis et d'autres maladies sexuellement transmissibles à des soldats, prostituées, prisonniers et malades mentaux sans leur consentement. En sont morts 83 cobayes. Ce disciple du docteur Schweitzer a aussi contribué à la Tuskegee syphilis experiment, programme allant de 1932 à 1972, auquel ont participé des métayers nègres croyant recevoir, outre un réel repas chaud quotidien, des soins médicaux gratuits (c'était avant Obamacare…), consistant en la simple observation de malades atteints de la syphilis, pour mieux connaître l'évolution de la maladie lorsqu'elle n'est pas traitée.

Dans tous les cas, ces brillants chercheurs ne semblent pas avoir touché plus que leur traitement de fonctionnaires, comme d'ailleurs les psychiatres ayant fait des recherches en matière de lavage de cerveau au service de la CIA et administré du LSD à des "patients" avec la collaboration de l'université McGill, laquelle a obligeamment mis à leur disposition les locaux et le matériel humain du Allan Memorial dans les années 50-60.   

Dernièrement, on a franchi un cap. Aux Etats-Unis, bigger is better.

On apprend, au sujet du programme d'interrogatoire "intensif" de la CIA des prétendus terroristes islamistes, la collaboration technique de deux psychologues, y compris en ce qui concerne la planification des simulations de noyade, qui ont même encaissé 80 millions de dollars en honoraires en 4 ans. L'Etat américain sait parfois être plus généreux pour ses spécialistes dévoués que ses homologues soviétique, nazi et sud-africain réunis. Chose certaine, ces deux psy sont des négociateurs hors-pair, en comparaison desquels les dirigeants d'Halliburton sont d'aimables novices.

Seul bémol en l'espèce, le contribuable américain peut avoir des réserves sur le rapport qualité/prix de ces prestations puisque nul renseignement exploitable n'a résulté de cette version contemporaine de l'Inquisition. Au moins, le Prussien von Braun, lui, a be et bien décroché la lune pour le compte des Etats-Unis, comme l'Italien Christophe Colomb a pris possession du nouveau monde au nom du roi d'Espagne.

Aux services de renseignement américains de tirer la leçon qui s'impose. Ils ont judicieusement su "délocaliser" les centres d'"interrogatoire", mais auraient dû penser à faire appel aux experts étrangers comptant une expérience plus solide.

On pense d'abord, instinctivement, à la Sainte Inquisition (mieux connue aujourd'hui sous la désignation moins poétique de "Congrégation pour la doctrine de la foi") de l'Eglise catholique; cependant, si ses annales regorgent d'utiles informations sur l'art de la Quaestio, elle ne compte plus de nos jours d'intervenants sur le terrain depuis que l'Eglise a perdu le pouvoir séculier. Les clercs se sont trop ramollis, sauf les auteurs d'abus sexuels/psychologiques perpétrés sur des petit(e)s paroissien(ne)s, ça va de soi.

La bonne volonté ne suffit pas lorsqu'on est rouillé.

Par contre, on aurait dû penser à solliciter auprès, par exemple, de la Corée du Nord, de la Chine, et du Zimbabwe le détachement de fonctionnaires toujours opérationnels et donc susceptibles d'assurer des services plus fiables, à des conditions financières plus intéressantes.

Opter pour la sous-traitance est souvent judicieux, mais le bon maître d'ouvrage doit savoir choisir ses maîtres d'œuvre.

N'est pas Wernher von Braun qui veut.

LP


Tuesday, December 16, 2014

Le 16 décembre 2014. Diplomatie et journalisme au Vatican.



Que toute personne soit soumise aux autorités supérieures; car il n'y a point d'autorité qui ne vienne de Dieu, et les autorités qui existent ont été instituées de Dieu.
- Romains 13:1

Cesse de croire et instruis-toi.
- André Gide.

Le présent est chargé du passé, gros de l'avenir.
- Leibnitz

Le dalaï lama est boudé à Rome.

Le refus du président sud-africain quasi-illettré d'accorder au dalaï lama un visa pour l'Afrique du Sud a eu pour résultat le déplacement de la 14e  édition du sommet des récipiendaires du prix Nobel, qui devait avoir lieu au Cap, à Rome.

Et voilà que le pape, qui a fait, paraît-il, vœu de chasteté, s'inspire de l'exemple du polygame zoulou : il a refusé d'accorder au chef spirituel tibétain une audience pendant son séjour dans la capitale italienne du 12 au 14 décembre dernier.

Un bel exemple d'aplatissement devant le gouvernement chinois, déterminé à détruire la culture tibétaine.

Le pontife pense que lécher, notamment, les bottes des empereurs de l'empire du Milieu permettra d'améliorer la liberté de culte des catholiques chinois, qui obtiendront quelques miettes d'hosties. Il n'a sans doute pas entièrement tort. A défaut de liberté de conscience complète, un arrangement à l'amiable avec Beijing laissera un peu plus de champ libre aux prédicateurs de l'Evangile, qui pourront éventuellement gagner des convertis et donc une plus grande part d'un juteux et prometteur marché.

Tout bien pesé, et soupesé, les droits des Tibétains bouddhistes ne constituent qu'un facteur d'importance secondaire dans l'équation diplomatique.

Puisque le Saint-Siège est, pendant des siècles, volontairement resté sourd aux hurlements des enfants violés par ses clercs, on s'y console en se disant que les petit(e)s chinois(e)s baptisé(e)s pourront, sans problème, continuer à assembler en usine nos téléphones portables et nos ordinateurs.

En matière de conscience professionnelle, un incident instructif s'est produit il y a quelques jours.

Certains médias ont, par erreur, attribué au pape François une déclaration portant que les animaux ont aussi accès au paradis, alors qu'elle avait pour source un pape antérieur, Paul VI. Ce quiproquo serait dû à une mauvaise lecture d'un article du Corriere della Serra.

Le porte-parole du Saint-Siège a opportunément profité de l'occasion pour susurrer ce sermon aux journalistes : « Il y a une règle fondamentale dans le journalisme. Cela s'appelle la vérification des sources et, dans le cas présent, elle n'a pas été appliquée.».

Nul doute que les journalistes qui ont péché, et été dûment chapitrés, pourraient avoir la dernière tentation de minimiser cette grave sentence pontificale en excipant de l'actualité doctrinale de son enseignement : peu importe le pontife qui l'a professé, il reflète la vision de l'Eglise (et son évidence est confirmé par le simple bon sens), même s'il n'a pas été prononcé ex cathedra. Dans un cas comme dans l'autre, Dieu merci, le bien-être des animaux dans l'au-delà reste assuré.

Cependant, ce serait oublier que, surtout en ce qui concerne notre sainte Mère l'Eglise, ce genre de moyen de défense serait un jésuitisme. Pis : la solution de facilité.

Tous les historiens, y compris du temps présent, se doivent de suivre systématiquement une méthode rigoureuse, sans parti pris, laquelle peut seule permettre la reconstitution du passé. Place Saint-Pierre, il n'y a que les faits bruts qui comptent; honnie soit la notion d'erreur sans importance…

C'est dans cet esprit rationnel que les autorités vaticanes avaient, d'ailleurs, réclamé l'examen scientifique d'un manuscrit découvert en 2012, évoquant apparemment un Christ marié, qu'elles qualifiaient sans hésitation de faux, puisque contraire à la Tradition. A la lumière des onctueuses, mais fermes, admonitions de Ciro Benedettini, le monde attend donc, logiquement, de la part de ces autorités, qui prêchent par l'exemple, le réexamen tout aussi critique de l'histoire du christianisme.

On pense surtout aux récits de miracles - surtout médicaux-, aux hagiographies et - sur le plan notamment documentaire-, à l'origine, à la datation et à la crédibilité des évangiles elles-mêmes en ce qui a trait à la réalité de son personnage central et des événements qui y sont relatés.

LP


Tuesday, December 9, 2014

Le 9 décembre 2014. Une sociologue féministe bientôt au pouvoir au Zimbabwe?


Ignorance is bliss.
- Robert Mugabe.

Il n'y a pas de vieux messieurs. Il n'y a que des femmes maladroites.
- Georges Clemenceau.

N'attendez pas le Jugement dernier. Il a lieu tous les jours.
- Albert Camus, dans La chute.

Ces jours-ci, au Québec, le 25e anniversaire de la tragédie de l'Ecole polytechnique stimule, et pour cause, la discussion du féminisme.

Quand on pense féminisme, il faut aussi penser tiers-monde, en particulier l'Afrique.

Saluons surtout une personnalité qui est déjà au service de ses compatriotes : la première dame du Zimbabwe, Grace Mugabe.

Un peu d'histoire.

Il y a 34 ans naissait le Zimbabwe des cendres de la Rhodésie blanche rebelle, aux termes d'un sanglant conflit. Par la suite, Robert Mugabe, le premier, et unique, président du nouveau pays connut quelques mineurs incidents de parcours, comme les massacres du Matabeleland de 1982 à 1987, pendant lesquels tombèrent ou furent torturés des dizaines de milliers de personnes (des chiffres qui relativisent les pertes causées par l'armée rhodésienne lors de la "Bush War" de 1965 à 1979), un simulacre d'élections en 1990, l'assassinat et la torture d'agriculteurs blancs dépouillés de leurs exploitations, résultant en des famines que la population noire n'avait jamais connues jusqu'alors, la neutralisation plus ou moins musclée des opposants politiques, etc.).

Mais… bref, pas de quoi fouetter… un chat, comme le révèle le silence des élites intellectuelles bien-pensantes qui avaient été beaucoup plus audibles avant 1980, et qui le restèrent en ce qui concerne l'Afrique du Sud jusqu'en 1994. (On relèvera au passage que ce dernier pays, gouverné à l'heure actuelle par un président polygame et où un bon tiers des femmes ont été victimes de violences sexuelles en tous genres, n'est peut-être pas, par les temps qui courent, un paradis féministe.)

Au Zimbabwe, donc, Robert Mugabe accorda l'honneur à Grace Marufu (elle-même encore mariée) de lui donner deux enfants pendant que son épouse, Sally, se mourait d'un cancer, au prix, toutefois, d'épuisants allers et retours entre l'unité de soins palliatifs et la maternité. Il faut lui rendre cet hommage : contrairement à son homologue zoulou, il sait que si un vrai monarque, pieux catholique de surcroît, peut avoir des favorites, il n'a droit qu'à une seule reine à la fois. Il eut d'ailleurs la noblesse d'attendre 4 ans après le décès de Sally en 1992 pour convoler en secondes noces -célébrées, cela va de soi, par un prêtre.

Un homme de principes.

Et alors que l'on évoque le premier anniversaire du décès du grand démocrate Nelson Mandela, dans la foulée de la triomphale réélection du président Mugabe à la tête du parti au pouvoir (ZANU-PF), sa tendre épouse actuelle vient d'être élue présidente de son aile féminine. On l'aura compris, madame Grace Mugabe est un symbole d'espoir, un modèle, pour les Zimbabwéennes, ayant fait ses preuves comme femme d'affaires, notamment en s'appropriant les fermes d'agriculteurs blancs "nationalisées", en dépensant 120 000$ lors d'un voyage à Paris; en outre, seule une femme de caractère peut tabasser un photographe qui a l'audace de la prendre en photo lors d'achats dans une boutique de luxe à Hong Kong.

Mais voici la pièce de résistance.

Elle a obtenu un doctorat en sociologie de l'université du Zimbabwe, et a reçu lors de la collation des grades en septembre dernier son parchemin des mains du chancelier, Robert Mugabe, comme naguère Joséphine sa couronne de Napoléon.

On s'étonne cependant de ne pas entendre les félicitations des universitaires du monde entier. Sans doute parce que, nul n'a encore eu le temps de lire (et de comprendre) sa thèse de 1450 pages (sans compter les renvois) probablement consacrée à la genèse des théories de Durkheim. Si l'on relève qu'elle n'a été inscrite à la faculté que 2 ou 3 mois, Simone de Beauvoir fait pâle figure aux côtés du docteur (pardon, de la docteure) Grace Mugabe.

D'aucuns pensent que cette intellectuelle accomplie est maintenant la mieux placée pour succéder à son époux comptant 90 printemps. Il est difficile d'en douter, vu ses prouesses scientifiques, même si, en principe, la vice-présidente, qui vient d'être limogée, Joice "Spill Blood" Mujuru était jusqu'à récemment la dauphine désignée (quoique rivale du ministre de la Justice, Emmerson "The Crocodile" Mnangagwa); hélas, elle aurait comploté l'assassinat de son président, une accusation dont le sérieux est confirmé par la révélation qu'il était question de recours à la sorcellerie.

D'une manière ou d'une autre, l'ex-Rhodésie reste entre de bonnes griffes. Il n'y pas que le SIDA qui y soit transmissible sexuellement depuis 1980, mais le pouvoir politique.

Le sort de millions de Zimbabwéens, et surtout de Zimbabwéennes, est scellé.

LP

Friday, December 5, 2014

Le 5 décembre 2014. Michaëlle Jean dirigera l'Organisation internationale de la francophonie.


Il est bon de suivre sa pente, pourvu que ce soit en montant.
- André Gide. 

Paris vaut bien une messe.
- Henri IV.

Madame Jean est une communicatrice hors-pair.

Elle a toujours su injecter dans ses discours, journalistiques et politiques, des trémolos et une pointe de mélodrame savamment dosés. La nouvelle secrétaire générale de l'OIF n'a pas déçu.

Une fierté pour le Canada? Nul doute. Mais, ces jours-ci, on évoque également les attaches françaises et haïtiennes de la nouvelle secrétaire générale. Françaises? Faut-il conclure que madame Jean a, discrètement, obtenu des autorités françaises sa réintégration?

On se souviendra qu'après avoir opportunément renoncé à ses convictions souverainistes québécoises, quelques jours avant d'assumer ses augustes fonctions vice-royales de gouverneur-général du Canada, elle a renoncé à la nationalité française. En effet, d'aucuns voyaient dans cette double appartenance une source potentielle de conflit d'intérêts pour la future commandante-en-chef des forces armées canadiennes.

Rideau Hall valait bien un accommodement raisonnable : le sacrifice d'un passeport.

Incidemment, il semble que détenir la nationalité haïtienne ne posait aucun problème. Cela est sans doute logique, puisque la notion d'"Etat haïtien" était (et demeure largement) un oxymore. En outre, on ne saurait nier que les perspectives d'affrontement nucléaire étaient nettement plus fortes avec la France qu'avec l'ex-perle des Antilles.

Au Canada, cette controverse n'avait rien de nouveau.

Alors qu'il était chef du parti libéral du canada, Stéphane Dion a dû faire face aux quolibets émanant d'un certain Canada, où l'on ne concevait pas un premier ministre canadien ayant aussi la nationalité française. M. Dion aussi a aussi démontré être une personnalité accommodante : c'est d'un ton veule, trahissant une colonne vertébrale sinon inexistante, certainement d'une plasticité remarquable, qu'il finit par déclarer, en désespoir de cause, être disposé à renoncer à la nationalité française si cela posait vraiment problème (sans préciser à qui…), au lieu d'invoquer, avec la fermeté qui s'imposait en l'occurrence, l'exemple d'un ancien chef de son propre parti et ex-premier ministre du Canada, John Turner, dont la naissance, au Royaume-Uni, d'un père anglais, n'a jamais donné lieu à quelque controverse que ce soit.

En ce qui concerne le chef de l'opposition au Parlement, le Québécois anglophone Thomas Mulcair, les choses se sont, heureusement, plus sereinement passées.

Y aurait-il, à l'occasion, deux poids, deux mesures, en matière de double nationalité au Canada? (Pour Stéphane Dion, la question n'est probablement plus d'une brûlante actualité).

Au Québec, Philippe Couillard de l'Espinay, baron de Jersey, a pu se faire élire premier ministre sans que nul ne lui eût fait grief de sa nationalité française. Il en ressort que ses administrés constituent bel et bien une société dont certains éléments sont distincts. En outre, l'autre lien national du féal sénéchal d'Ottawa n'a, in fine, rien de répréhensible : il y donne entière satisfaction et n'a, forcément, pas d'aspirations politiques pancanadiennes.

Ironie de l'histoire, c'est au Sénégal que Michaëlle Jean vient de se faire conférer sa nouvelle mission. Un pays dont le premier président, Léopold Sédar Senghor, a conservé la nationalité française jusqu'à son dernier souffle.

Un intéressant exemple d'apôtre de la francophonie.

LP

Monday, December 1, 2014

Le 1er décembre 2014. Notre Saint-Père le Pape est contre l'intégrisme!



C'est la certitude qu'ils tiennent la vérité qui rend les hommes cruels. 
- Anatole France.

Je pense qu'il y a une continuité inconsciente du fanatisme.
- Elie Wiesel.


Voilà l'émouvante profession de foi faite par François le vendredi 28 novembre à Ankara (Turquie), suivie d'une ostentatoire prière dans la mosquée bleue. On ne le dira jamais assez, en 2014, cette démarche reflète une audace remarquable. Le pontife est un précurseur.

Il prône notamment, en présence du président Erdogan - qui interdit aux femmes de rire - une "sainte alliance" islamo-chrétienne… contre l'intégrisme. Nul doute que la voilée madame Erdogan a apprécié...

On peut aussi voir dans cet appel un Yalta religieux, une volonté de partage du monde, d'établir un condominium religieux sur la planète, un duopole, notion rejetée en matière économique par les lois anti-monopoles… Au lieu de se faire une dure concurrence, on trouve maintenant plus sage de se partager le lucratif marché des âmes, derrière des paravents de vertu. Cela explique peut-être que, au Québec, on trouve de pieux ecclésiastiques chrétiens pour promouvoir la "liberté" des femmes musulmanes de porter le voile, une pratique qui a aussi l'avantage de faciliter le marquage des territoires.

Pour autant, les onctueuses déclarations du Saint-Père laissent un arrière-goût d'inachevé. Annoncent-elles des mesures concrètes?

Verra-t-on prochainement un désaveu de l'Opus Dei, toujours en odeur de sainteté? On semble un peu embarrassé, sans plus, ces temps-ci par les frasques (longtemps étouffées par les petits copains Jean-Paul II et sa clique) homo- et hétérosexuelles du père Marcial Maciel Degollado, naguère supérieur de la Légion - oui… "Légion"- du Christ… On est loin d'un Charles de Foucauld.

Mieux encore, on apprécierait une remise à jour du statut de certains zélés serviteurs du Christ ayant accédé au panthéon catholique. Plus précisément, on pense à Cyrille d'Alexandrie, un père de l'Eglise, canonisé par la voix populaire (vox populi, vox Dei) et proclamé docteur de l'Eglise en 1882. Le successeur de Torquemada, l'ex-grand inquisiteur Ratzinger, alias Benoît XVI, lui a rendu un vibrant hommage en 2007 pour son importante contribution au culte marial.

Cependant, l'examen complet de ces impressionnants états de service appelle des nuances.

La vocation de ce patriarche était de combattre les païens, les juifs et les hérétiques chrétiens, pas seulement sur le plan des idées. Cyrille ne faisait pas dans la dentelle et ses persécutions ont produit des rivières de sang. A son décès en 444, les synagogues avaient disparu d'Alexandrie et il n'y restait presque plus de minorités religieuses. Un efficace travail d'épuration d'une ville qui avait été un bouillonnant centre intellectuel et cosmopolite.

Son plus spectaculaire titre de gloire est d'avoir incité, en 415, une foule enragée à lyncher Hypathie, dont le seul crime fut d'avoir été philosophe et mathématicienne. La meute hurlante lui retira tous ses vêtements, l'amena de force dans une église où on lui découpa méthodiquement toutes ses chairs jusqu'à l'os à l'aide de coquilles d'huîtres acérées jusqu'à ce que mort s'ensuive; les membres encore frémissants de son corps martyrisé furent jetés aux flammes. D'ailleurs, nulle enquête ne fut menée à terme par les autorités en raison de généreux pots-de-vin.

Les assassinats de nègres par le Ku Klux Klan, 16 siècles plus tard, pâlissent (si l'on ose dire) quelque peu en comparaison. Mais que voulez-vous? La civilisation ramollit.

Grâce au consciencieux labeur de Cyrille, Alexandrie ne fut plus troublée par ces casse-pieds de philosophes. S'il est étrange qu'il ne soit pas devenu le saint patron des bouchers et rôtisseurs, signalons que, à l'heure actuelle, il est toujours vénéré également par les églises orthodoxe, anglicane et luthérienne. Un réconfortant terrain d'entente œcuménique, sinon institutionnel, entre chrétiens.

Puisque le Saint-Siège s'est résolu, de guerre lasse, à prendre des mesures symboliques au sujet des prêtres pédophiles, a fortiori, on pourrait au moins espérer le réexamen de la contribution doctrinale de Saint- (oui… "Saint-") Cyrille, dont les exploits dépassent en horreur les abus sexuels perpétrés, à l'occasion dans des conditions d'asepsie douteuses, sur des enfants, par des théologiens trop souvent oublieux de leur mission première conférée par l'ordination : l'enculage des mouches.

L'évêque de Rome ne trompera que qui veut avec son prêchi-prêcha contre l'intégrisme.

Qu'il commence à balayer devant sa porte (on l'aura compris, sa porte arrière) et renie (3 fois plutôt qu'une) ses propres illuminés, passés ou toujours très présents. Et pendant qu'il y est, qu'il jette dans les flammes les torchons de (Saint-) Paul - un juif renégat devant… l'Eternel qui a coupé les ponts avec la communauté médicale urologique - et tout le reste du Nouveau Testament.

LP