Le 2 septembre 2018.
Bon
fourrage donne beaucoup de beurre.
Proverbe agricole.
Proverbe agricole.
Enfants de la même patrie, nous nous aimons à la manière des rats autour du même fromage : à qui le gros morceau?
- Anne Barratin.
La cause est entendue
: le président Donald Trump est un parfait idiot. Mais même les idiots peuvent
promouvoir, fût-ce involontairement, des idées avantageuses.
Les négociations canado-américaines
relatives à l'ALENA risquent d'achopper sur la question de la gestion de
l'offre en vigueur au Canada, visant les produits laitiers et la volaille, un
système anticoncurrentiel qui relèverait de la loi pénale s'il n'était avalisé
par un entrelacs de lois scandaleusement protectionnistes. (Une précision
sémantique quant à la notion de "protection" : outre son sens
mafieux, on protège certains agriculteurs au détriment du grand public). Cette
fraude organisée fait maintenant irruption dans la campagne électorale
québécoise.
Avec une sinistre unanimité,
les quatre grands partis provinciaux se muent en chevaliers blancs, défenseurs
de la petite ferme (laitière) québécoise, occultant cette lugubre vérité que
les consommateurs sont des vaches à lait qui payent trop cher leur beurre, y
compris les démunis, les pauvres malheureux, la veuve et l'orphelin exploités par
le capitalisme, que prétend défendre surtout Québec solidaire avec des trémolos
dans la voix : Manon Massé dénonce avec une hargne "populaire" et sélective
le "cartel du web", mais gobe crue la propagande de la coterie agricole; Jean-François
Lisée, pour sa part, veut charger l'Etat de la mission restauratrice consistant
à préparer les "lunchs" des citoyens, sans, manifestement, se poser trop
de questions sur le prix des ingrédients. "Just watch me" éructe
"sheikh" Philippe Ibn-Couillard, à l'attention des terroristes
anti-gestion, sûrement impressionnés!
Et pourtant, pendant
qu'on y est, personne ne défend la petite quincaillerie. Ni les petits
plombiers. Ni la petite pâtisserie. Encore moins les petits fleuristes. La
concurrence, c'est excellent… pour les autres.
Par ailleurs, les crânes d'œuf défenseurs du statu quo font toute
une tartine avec les subventions accordées par le gouvernement américain aux agriculteurs,
ce qui fait baisser le prix de leur beurre. Tant mieux! Le consommateur
canadien sera ravi de se faire financer par le contribuable américain. Voilà,
pour une fois, une forme de "ruissellement" qui serait bien réelle. (En
ce qui concerne les fromages pasteurisés du Wisconsin, bien fades en
comparaison avec les fromages français puants au lait cru, ils ne trouveront
qu'un marché limité au Québec…).
A cet égard, il faut
rendre hommage au député fédéral Maxime Bernier : alors qu'il est député d'une
circonscription où se trouvent de nombreux bénéficiaires de ce système
d'extorsion publique, il en a prôné l'abolition, au moment où il se présentait
à la direction du parti conservateur. Résultat : de nombreux proprios de vaches laitières sont devenus
instantanément, à la dernière minute, membres du parti afin de saboter sa
campagne, formant une hurlante jacquerie. Et leur coup d'Etat a réussi! C'est rentré comme dans du beurre. Un
triomphe de la démocratie participative!
Leurs mugissements
leur rapportent : ils font leur beurre, eux, et ils ont le beurre et l'argent
du beurre. Nul doute qu'ils boivent du petit lait. Ils peuvent mettre du beurre
sur leurs propres épinards (moins protégés…). L'assiette au beurre n'est pas
toujours celle du consommateur, qui, lui, compte pour du beurre et reste le
dindon de la farce, et peut aller se faire cuire un oeuf.
Les amateurs de quiche
lorraine canadiens se font encore imposer ce sordide anachronisme, alors qu'il a
été aboli, et dénoncé, dans le pays même où il fut jadis conçu : l'Australie.
Les ruraux inefficaces pâtiront de sa mise au rancart, mais on ne fait pas
d'omelette sans casser des œufs.
Donald Trump est le
fossoyeur de son propre pays. Il n'a pas inventé le fil à couper le beurre,
mais, en refusant toute concession sur la nécessaire suppression de la gestion
de l'offre, il a peut-être l'occasion de devenir le héros du consommateur
canadien.
Et si l'on parlait de cuisine
à l'huile d'olive, bien plus santé?
LP
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