Tuesday, September 25, 2018

Elections au Nouveau-Brunswick (Canada) de 2018 : embrouillamini.



Le 25 septembre 2018.

Le génie de notre langue est la clarté.
- Voltaire.

L'argot, c'est la langue des ténébreux.
- Victor Hugo.

Les résultats sont peu concluants.

Les Libéraux de l'Acadien Brian Gallant remportent 21 sièges avec 37,8% des voix, tandis que les rednecks seront représentés par les 22 élus du parti (progressiste-?) conservateur de Blaine Higgs alors qu'ils ont obtenu 31,9% des suffrages, auxquels il faut ajouter les 3 députés de la "People's Alliance of New Brunswick", dont les réticences apparentes en matière de bilinguisme semblent concrétisées par la peu idiomatique appellation "Alliance des gens du Nouveau-Brunswick".

Voilà le genre d'absurdité à laquelle peut aboutir le scrutin uninominal à un tour.

Cela dit, les choses étant ce qu'elles sont, M. Gallant compte bien obtenir la confiance de l'assemblée législative avec l'appui du parti vert. Comme l'a éloquemment expliqué cet érudit jurisconsulte, pur produit de la faculté de droit de l'université de Moncton, avec cet accent qui sent le homard, ces deux partis partagent "les mêmes valeurs fondamentaux" (sic). Dans la seule province canadienne officiellement bilingue (s'il faut en croire les textes législatifs), tout est dit.

Au pays des crustacés balayé par les embruns iodés du large, M. Gallant va donc faire certain de retourner back au pouvoir.

LP

Friday, September 21, 2018

S'ils n'ont pas de pain, qu'ils mangent du baklava.



Le 21 septembre 2018.

There are people in the world so hungry, that God cannot appear to them except in the form of bread.
- Gandhi.

Dieu a dit : "Je partage en deux, les riches auront de la nourriture, les pauvres de l'appétit."
- Coluche.
                  
La campagne électorale continue de plus belle au Québec, et le grand vizir, "sheikh" Philippe Ibn-Couillard, sollicite un deuxième mandat à titre de chef du parti libéral "Pour faciliter la vie des Québécois".

Et voilà qu'il lui est reproché une certaine déconnexion en ce qui concerne la vie quotidienne, pardon hebdomadaire, de certains Québécois : il vient de déclarer, sans rire, avec sa faconde de marchand de tapis, qu'il est possible de nourrir une famille de trois personnes avec un budget de 75$ par semaine.

Les réseaux sociaux se déchaînent contre lui, mais là encore, l'indulgence s'impose. Après avoir encaissé pendant plusieurs années les juteux pétro-dollars non-fiscalisés des monarques saoudiens pour avoir développé un système hospitalier équipé de cuisines gastronomiques (rien ne vaut la haute cuisine pour assurer une meilleure convalescence des patients), il est normal de souffrir d'un certain décalage avec certaines réalités sociales québécoises; on phosphore un peu moins, même si on est neurochirurgien, et la réadaptation des neurones peut être longue et difficile.

Au Québec, non seulement les femmes disposent de la complète liberté vestimentaire, mais il y a des démunis qui ne peuvent manger des shawarmas tous les jours.

Lors de leur prochaine visite au supermarché ou au "dépanneur" (il n'y a qu'en France où l'on s'approvisionne chez "l'Arabe du coin"), pour régler la note, les Québécois pauvres n'auront qu'à présenter leur carte bancaire délivrée par un établissement financier de l'ile de Jersey recommandé personnellement par le(ur) grand vizir, surtout que ce dernier déclare connaître personnellement des personnes vivant dans la précarité et proclame donc son empathie. Et, s'il leur manque à la fin de la semaine quelques riyals, pardon, quelques dollars, ils pourront obtenir d'une banque alimentaire de leur quartier de généreuses rations complémentaires de dattes et de rahat-loukoum.

Et de safran pour donner du piquant à leur ordinaire de la semaine prochaine.

Peut-on imaginer meilleur plan de lutte contre la pauvreté?

LP

PS. Les recettes du bon Dr Couillard.

Le disciple du Dr Schweitzer persiste et signe avec ces conseils culinaires :

 « D’abord tu regardes toutes les circulaires – c’est du témoignage direct de monde. Tu vas magasiner uniquement ce qui est vente, et il y a toujours des produits qui sont en vente de façon importante. Un morceau de viande par exemple, un morceau de porc… Tu le fais cuire le premier soir comme un rôti de porc. Ensuite tu fais du macaroni avec du porc dedans. Ensuite tu fais un pâté chinois avec du porc avec [Note pour les lecteurs européens, il s'agit de "hachis parmentier"]. Ensuite, tu fais des sandwichs pour les enfants. C’est ça que le monde fait … Le pain, tu ne l’achètes jamais à 4 $, 5 $, tu l’achètes à 3 $. C’est sans arrêt, c’est comme une job à temps plein ».

Et voilà, le tour est joué. Il suffit d'un peu d'organisation et de créativité, que diable! Encore qu'il faudrait peut-être quand même ajuster un peu le chiffre de 75$ pour les familles qui ne consomment pas de porc : le boeuf et l'agneau sont plus chers.

On lui souhaite bonne chances aux élections, mais si par malheur il devait quitter le pouvoir, il n'aura qu'à publier son livre de recettes, qui aura encore plus de succès que les recettes de maman Dion. Mieux, il pourra coanimer des émissions de télévision avec sœur Angèle.

Friday, September 14, 2018

Elections québécoises de 2018 : une révélation au débat des chefs.



Le 14 septembre 2018.

Le plagiat humain auquel il est le plus difficile d'échapper, pour les individus (et même pour les peuples qui persévèrent dans leurs fautes et vont les aggravant), c'est le plagiat de soi-même.
- Marcel Proust.

Sur le plan des programmes politiques, rien de nouveau n'a filtré du premier débat du 13 septembre, ponctué de quelques cacophonies occasionnelles.

On savait déjà que le bilan du gouvernement libéral sur le plan du système de santé est un désastre; que M. Legault feint de croire qu'on l'accuse de vouloir expulser du Québec des citoyens canadiens qui auraient échoué à un examen des valeurs; que Mme Massé déclare correctement que le changement climatique est le problème du siècle pour toute l'humanité, tout en jouant la carte rurale en défendant le système scandaleusement anticoncurrentiel, et donc anticonsommateur, qu'est la gestion de l'offre, suivi en ce sens par M. Lisée, etc..

Par contre, on apprend que le grand vizir du Québec, "sheikh" Philippe Ibn-Couillard, n'est pas toujours très original dans ses réparties bien planifiées. Il n'est pas le seul politicien à ne pas vouloir réinventer la roue : les ancêtres parmi les lecteurs se souviendront que, pendant la campagne des primaires aux Etats-Unis de 1987-8, Joe Biden, futur vice-président, fit cet émouvant plaidoyer en faveur de la justice sociale :

"Why is it that Joe Biden is the first in his family ever to go a university? Why is it that my wife... is the first in her family to ever go to college? Is it because our fathers and mothers were not bright? ...Is it because they didn't work hard? My ancestors who worked in the coal mines of northeast Pennsylvania and would come after 12 hours and play football for four hours? It's because they didn't have a platform on which to stand."

Il suivait ainsi les brisées de Neil Kinnock qui expliquait, quelques semaines auparavant, lors d'une conférence du parti travailliste du pays de Galles :

"Why am I the first Kinnock in a thousand generations to be able to get to university? Was it because our predecessors were thick? Does anybody really think that they didn't get what we had because they didn't have the talent or the strength or the endurance or the commitment? Of course not. It was because there was no platform upon which they could stand."

Et voilà que "sheikh" Philippe, aussi de nationalité française, lance à M. Lisée au cours d'un affrontement consacré aux failles du système de santé québécois, que ce dernier n'avait pas le "le monopole de la compassion". Voilà qui ressemble fort à la réplique de Valéry Giscard d'Estaing visant François Mitterrand lors du débat présidentiel de l'entre-deux-tours télévisé du 10 mai 1974 : "Vous n'avez pas le monopole du cœur". En ce qui concerne "sheikh" Philippe, on suppute une répartie jaillie de sa mémoire plutôt que de son coeur. Les analystes pensent que la petite phrase assassine de VGE assura alors son élection. Jouera-t-elle le même rôle sacramentel en 2018 pour le grand vizir au Québec? Les paris sont ouverts. Inch'Allah.


Enfin, il faut relever le sirupeux :


"Je vais être obligé de vous expliquer un peu, là (on notera ce tic de langage bien québécois), écoutez-moi"

adressé à la seule femme sur le plateau, Manon Massé, sur l'attendrissant ton de rigueur chez les gentils instituteurs pleins de compassion envers les fillettes atteintes de difficultés d'apprentissage, ou encore chez les instructeurs d'auto-école. D'aucuns en dégageront des relents de machisme sexiste.
 
Cependant, "sheikh" Philippe a droit à l'indulgence. Quand on a le titre de gloire d'avoir passé 4 ans en Arabie saoudite - où il fut dispensé de ponctions fiscales écrasantes - et d'y avoir contribué, avec une immense compassion, à l'amélioration d'un système de santé spectaculairement plus performant que celui du Québec, et quand le cœur y est encore un peu (un peu seulement car le roi n'a sûrement pas le monopole du cœur du grand vizir), il y a certains automatismes, certains acquis culturels, dont il est difficile de se débarrasser.

On peut alors avoir tendance à oublier que les femmes québécoises ont, depuis un certain temps, le droit de sortir seules, de prendre le volant et qu'elles ne sont plus tenues de se couvrir la tête en public, même pour aller à l'église.

LP

Saturday, September 8, 2018

Elections québécoises de 2018 : l'immigration fait irruption dans le débat.



Le 8 septembre 2018.

Il ne faut pas oublier tout ce que les immigrés ont apporté à La France, les Picasso, Béart, Cioran… C'est une chance extraordinaire pour la France. Il y a peut-être parmi eux de futurs Aznavour, qui sait?
- Charles Aznavour, né Shahnourh Varinag Aznavourian.

- Vot' nom ?
- Vian, n'adjudant.
- Vot' prénom ?
- Boris, n'adjudant.
- Z'êtes estranger ? Z'êtes arménien ? Z'êtes encore un de ces métèques ?
(Conversations avec un adjudant)

Selon le chef de la Coalition Avenir Québec, 58% des immigrants s'installant au Québec ne parlent pas français, ce qui constituerait une menace pour l'identité québécoise. Après avoir soufflé le chaud, François Legault souffle le froid en mettant l'accent sur l'importance des qualifications professionnelles brutes, pas seulement linguistiques, d'où l'ire de Jean-François Lisée, qui, pourtant, semble le suivre sur le plan de la réduction du nombre d'immigrants, mais peut-être pas en ce qui concerne le regroupement familial. Cependant, le chef du Parti Québécois exige la maîtrise du français comme condition préalable à l'installation au Québec.

Comprenne qui pourra.

S'il est exact que les immigrants doivent être prévenus, dès leur arrivée (et même avant) qu'ils devront s'intégrer, au fil des ans, à la population francophone, notamment par la scolarisation de leurs enfants, plutôt qu'à la minorité anglophone comme c'était le cas à une époque plus coloniale, et que certaines habitudes cultu(r)elles ne sont pas intégralement transplantables sur les rives du Saint-Laurent, différents secteurs d'activité professionnelle peuvent appeler des contraintes variables en matière d'interaction : si un psychiatre doit être pleinement opérationnel en français pour son premier patient, les carences communicatives du médecin-légiste polonais auront un impact sans doute moindre; il en va de même pour l'ingénieur nucléraire estonien, l'informaticien malais et le plombier slovaque. Et quid de la pénurie de main-d'œuvre dans le secteur de la restauration-hôtellerie? Quand on voit des restaurants en Gaspésie qui doivent réduire leurs activités, ou même qui ferment, on pèse le pour et le contre. Il n'est nul besoin d'être en mesure d'ergoter sur la madeleine de Proust pour mitonner un succulent homard thermidor.

Le palais n'est pas toujours tributaire de la langue.

Quand aux 26% des nouveaux arrivants qui quittent le Québec, personne n'évoque la scandaleuse non-reconnaissance des diplômes étrangers, à l'exception de Québec Solidaire, y compris ceux qui sanctionnent les connaissances scientifiques et rationnelles acquises par les étrangères musulmanes rejetant la soumission au statut de simple pondeuse, symbolisé par le port du voile.
                                  
M. Legault craint que "nos petits-enfants ne parleront plus français", vu le péril posé notamment par le regroupement familial. L'argument de l'ex-pédégé d'Air Transat vole bas. Les Québécois qui songent à épouser un étranger sont donc prévenus : l'âme sœur doit parler français! Plus question de l'apprendre plus tard sur l'oreiller.

Pourtant, voilà un genre d'immigration qui constitue une chance pour le Québec sur le plan génétique : au lieu d'y faire obstacle, il faut développer ce filon qui contribuera à remédier au problème séculaire de consanguinité de la population québécoise. Des transfusions de sang neuf allègeront la pression sur le système de santé, et aussi sur le système scolaire, où sont déjà débordés les trop rares éducateurs spécialisés en enfants atteints de troubles d'apprentissage. La santé publique appelle notamment l'incitation des Saguenéens à l'exogamie, pour lesquels le seuil du métissage est encore trop souvent défini par l'union avec un conjoint cousin au deuxième degré.

Au Québec, c'est en français que ça se passe? Il faut relativiser, vu le piètre état de la grammaire et les anglicismes spontanément affectionnés par les Québécois "de souche", dans les écoles, dans la classe politique, et même dans les médias. L'anglicisation n'a pas attendu l'invasion des hordes de métèques. Les grandes gueules qui exigent la connaissance du français chez les immigrants devraient se livrer à une salutaire introspection sur la leur (on les dispensera magnanimement de renoncer à leur grinçant accent poitevin).

Mais on peut être optimiste : il y a suffisamment de Maghrébin(e)s et de Libanais(e)s, qui dédaignent tant la croix que le hijjab, pour rehausser le niveau linguistique du Québec vu qu'ils maîtrisent souvent mieux leur deuxième langue que les Tremblay leur prétendue langue maternelle. Le ministère québécois de l'éducation sait où il peut lancer sa campagne de recrutement d'instituteurs. Les résultats ne se feront pas attendre.

Trois ans au maximum, monsieur Legault.

LP

Sunday, September 2, 2018

La gestion de l'offre au Canada : le piège à cons.


Le 2 septembre 2018.
 
Bon fourrage donne beaucoup de beurre.
Proverbe agricole.


Enfants de la même patrie, nous nous aimons à la manière des rats autour du même fromage : à qui le gros morceau?
- Anne Barratin.

La cause est entendue : le président Donald Trump est un parfait idiot. Mais même les idiots peuvent promouvoir, fût-ce involontairement, des idées avantageuses.

Les négociations canado-américaines relatives à l'ALENA risquent d'achopper sur la question de la gestion de l'offre en vigueur au Canada, visant les produits laitiers et la volaille, un système anticoncurrentiel qui relèverait de la loi pénale s'il n'était avalisé par un entrelacs de lois scandaleusement protectionnistes. (Une précision sémantique quant à la notion de "protection" : outre son sens mafieux, on protège certains agriculteurs au détriment du grand public). Cette fraude organisée fait maintenant irruption dans la campagne électorale québécoise.

Avec une sinistre unanimité, les quatre grands partis provinciaux se muent en chevaliers blancs, défenseurs de la petite ferme (laitière) québécoise, occultant cette lugubre vérité que les consommateurs sont des vaches à lait qui payent trop cher leur beurre, y compris les démunis, les pauvres malheureux, la veuve et l'orphelin exploités par le capitalisme, que prétend défendre surtout Québec solidaire avec des trémolos dans la voix : Manon Massé dénonce avec une hargne "populaire" et sélective le "cartel du web", mais gobe crue la propagande de la coterie agricole; Jean-François Lisée, pour sa part, veut charger l'Etat de la mission restauratrice consistant à préparer les "lunchs" des citoyens, sans, manifestement, se poser trop de questions sur le prix des ingrédients. "Just watch me" éructe "sheikh" Philippe Ibn-Couillard, à l'attention des terroristes anti-gestion, sûrement impressionnés!

Et pourtant, pendant qu'on y est, personne ne défend la petite quincaillerie. Ni les petits plombiers. Ni la petite pâtisserie. Encore moins les petits fleuristes. La concurrence, c'est excellent… pour les autres.

Par ailleurs, les crânes d'œuf défenseurs du statu quo font toute une tartine avec les subventions accordées par le gouvernement américain aux agriculteurs, ce qui fait baisser le prix de leur beurre. Tant mieux! Le consommateur canadien sera ravi de se faire financer par le contribuable américain. Voilà, pour une fois, une forme de "ruissellement" qui serait bien réelle. (En ce qui concerne les fromages pasteurisés du Wisconsin, bien fades en comparaison avec les fromages français puants au lait cru, ils ne trouveront qu'un marché limité au Québec…).

A cet égard, il faut rendre hommage au député fédéral Maxime Bernier : alors qu'il est député d'une circonscription où se trouvent de nombreux bénéficiaires de ce système d'extorsion publique, il en a prôné l'abolition, au moment où il se présentait à la direction du parti conservateur. Résultat : de nombreux  proprios de vaches laitières sont devenus instantanément, à la dernière minute, membres du parti afin de saboter sa campagne, formant une hurlante jacquerie. Et leur coup d'Etat a réussi! C'est rentré comme dans du beurre. Un triomphe de la démocratie participative!

Leurs mugissements leur rapportent : ils font leur beurre, eux, et ils ont le beurre et l'argent du beurre. Nul doute qu'ils boivent du petit lait. Ils peuvent mettre du beurre sur leurs propres épinards (moins protégés…). L'assiette au beurre n'est pas toujours celle du consommateur, qui, lui, compte pour du beurre et reste le dindon de la farce, et peut aller se faire cuire un oeuf.

Les amateurs de quiche lorraine canadiens se font encore imposer ce sordide anachronisme, alors qu'il a été aboli, et dénoncé, dans le pays même où il fut jadis conçu : l'Australie. Les ruraux inefficaces pâtiront de sa mise au rancart, mais on ne fait pas d'omelette sans casser des œufs.


Donald Trump est le fossoyeur de son propre pays. Il n'a pas inventé le fil à couper le beurre, mais, en refusant toute concession sur la nécessaire suppression de la gestion de l'offre, il a peut-être l'occasion de devenir le héros du consommateur canadien.

Et si l'on parlait de cuisine à l'huile d'olive, bien plus santé?

LP