Thursday, May 9, 2024

Alarmante érosion de la bienséance parlementaire au Canada.

 Le 9 mai 2024.

Le style c’est l’homme.
Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon.

(AVERTISSEMENT : CERTAINS PROPOS PEUVENT HEURTER LA SENSIBILITÉ DES LECTEURS).

Il y a quelques jours, le chef de l’opposition conservatrice à la chambre des communes, Pierre Poilièvre, dénonçait avec indignation, en matière de dépénalisation d’usage de drogues dure en Colombie-Britannique, une politique « cinglée » promue par un premier ministre « cinglé ». (« waco », en v.o.); après un simulacre de rétractation, par lequel il proposait de remplacer « cinglé » par « extrémiste », il fut expulsé de l’assemblée pour une longue journée. Il la réintégra le lendemain comme si de rien n’était.

Quelques jours plus tard, le lundi 6 mai, devant le comité permanent des langues officielles, deux chercheurs exposaient en témoignage leur conclusion portant qu’une éducation en anglais aux niveaux collège (lycée en France) et universitaire constitue un facteur favorisant l’anglicisation de la société québécoise. Ce témoignage valut à ces chercheurs une immonde insulte (« vous êtes plein de marde », puis « extrémistes ») de la part du député libéral franco-ontarien Francis Drouin, sur la base d’une brillante découverte : divers facteurs peuvent jouer en matière d’anglicisation! Qui l’eût cru? Vu son ignorance crasse en matière de méthodologie statistique, il n’avait pu comprendre que ces deux chercheurs s’exprimaient, précisément, sur un facteur scientifiquement isolé, comme le font les oncologues sur le rôle du tabagisme et de l'alcoolisme quant au cancer. En effet, fumer des barreaux de chaise et siffler une bouteille de whisky par jour n'ont pas empêché Winston Churchill d'atteindre l'âge de 95 ans 

Le député de Glengarry-Prescott-Russell fut immédiatement appuyé par le ministre notamment des langues officielles Randy Boissonnault, qui déclara, sans rire, qu’avoir été éduqué en français en Alberta n’avait pas contribué à la francisation de sa province. On le croit sur parole car le français est loin d’y être la langue dominante.

(À noter au passage la partie la plus inattendue de son intervention : on vient d’apprendre qu’il est « francophone »).

Il va sans dire que les pantins du groupe parlementaire libéral se livrent maintenant à de pitoyables acrobaties pour minimiser la vulgarité de leur collègue Drouin.

Par ailleurs, vu les réactions indignées de la classe politique au Québec, le « cinglé » ou « extrémiste », pseudo-francophone Justin Trudeau n’a rien trouvé de mieux que d’accuser démagogiquement, en chambre, le bloc québécois d’avoir une dent contre les francophones hors Québec et de s’en prendre à un (pauvre petit?) franco-ontarien.

Bref, on est passé d’un argot d’adolescent en crise à la plus abjecte scatologie, d’autant plus répréhensible qu’elle est la traduction littérale d’une expression anglaise (peu prisée dans les milieux évolués) et que le mot de Cambronne fut prononcé de manière honteusement populacière.

(Note socio-linguistique : dans les bas-fonds franco-ontariens et québécois, les locuteurs remplacent le « e » par un « a »).

Le sieur Drouin, qui pose de manière grandiloquente en défenseur de la langue française, ne fait que péter plus haut que son trou du cul. Sur la forme et sur le fond. En l'occurrence, surtout le fond. Au final, il n'est qu’un méprisable péquenaud. Un malotru. Un goujat. Un rustre. Un butor. With friends like that, who needs enemies?

Pauvre Bernard Pivot. Qu’il repose en paix.

Dernière minute : on apprend que le (toujours…) président de la section canadienne de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) présente finalement ses excuses « officielles » à M. Lacroix et à M. Bourdon. Vu leur caractère trop tardif, on ne peut que l’inviter à se les mettre là où le soleil ne brille jamais.

LP

 

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