Thursday, June 2, 2022

"Bataille pour l'âme du Québec": une manoeuvre de propagande.

 Le 2 juin 2022.

Et vivre, c’est ne pas se résigner.
- Albert Camus.

Voilà un pseudo-documentaire, plutôt un (autre) sermon, de Francine Pelletier (dont la sérénité journalistique a perdu un peu de son lustre depuis l’affaire Jian Ghomeshi), diffusé samedi dernier sur les ondes de Radio-Canada.

Du pain bénit pour les lobbies religieux.

Beaucoup de prêchi-prêcha, notamment quand on essaie de qualifier de “régression” la défense de la laïcité, ou séparation de la religion et de l'Etat, dans la société québécoise et de la fonction publique (hormis quelques exceptions, excessives d’ailleurs) chacun a la pleine et entière liberté de culte et de croyance en de puérils, et parfois sinistres, contes de fées (surtout des Carabosse).

Le téléspectateur a eu droit au sempiternel argument portant que les lois laïques promulguées par le gouvernement Legault visent concrètement les femmes musulmanes, notamment enseignantes, ce qui est objectivement faux puisque elles sont applicables à tous les signes religieux, par exemple sikhs. Evidemment, elles ne peuvent plus viser les bonnes soeurs à cornettes, vu que le Québec les a virées des écoles publiques! Faut-il s’en excuser? Ou faut-il les ressusciter pour les combattre devant les juges sur un pied d’égalité avec les prisonnières du hijjab? Comme l’a quand même expliqué Louise Beaudoin, ces lois sont fondées non pas sur une imaginaire islamophobie, mais sur la mémoire de la tyrannie religieuse millénaire, qui a opprimé le Québec pendant trop longtemps. La dénonciation d’un retour identitaire au Québec d’avant 1960 est particulièrement perfide : le gouvernement québécois ne fait pas la promotion de la religion catholique. Bien au contraire, il a eu le courage de retirer l’ignoble crucifix qui répandait ses ondes maléfiques sur le président de l'assemblée nationale, une insulte permanente pour les non-Chrétiens et les agnostiques, athées et autres païens québécois. Une extraordinaire "progression". Maurice Duplessis a dû se retourner dans sa tombe.

Quant à la grotesque affirmation portant que la situation est complexe, on répondra que l'immigrant devient québécois quand il adopte le français, au lieu de l'anglais autrefois.

(Comme il devient flamand à Anvers quand il devient néerlandophone; comme il devient suisse roman quand il parle français à Genève et comme il devient suisse alémanique quand il s’exprime d’abord en allemand à Zürich). 

Et il suffit que les fonctionnaires au service de l’État Québécois de toutes races et de toutes origines respectent leur devoir de réserve, pendant 37.5 heures par semaine. C'est simple comme bonjour.

Sauf évidemment pour le poutinesque quotidien The Gazette et les commissions scolaires anglophones, qui vomissent aussi, sans vergogne, leurs fielleux embrouillaminis. En 2022, le Québec opprimerait ses Russes du Donbass. Il serait nettement plus utile socialement de critiquer le gouvernement Legault, notamment pour sa nonchalance en matière d'environnement.

(Evidemment, ses petits chèques aux contribuables pour la hausse du coût de la vie n'ont rien, mais alors rien à voir avec les très prochaines élections.)

Les Djemila Ben Habib, les Fatima Houda-Pépin auraient remis les pendules à l’heure. Le vécu de ce genre de femmes est trop souvent occulté, et pour cause.

Qu’on se le dise : les victoires contre la tyrannie sont toujours temporaires et les libertés menacées. Rappelons que le Canada est une théocratie vu la lettre divinement claire du préambule de la loi constitutionnelle de 1982 : “Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit”). Et d'ailleurs, les séances du parlement à Ottawa commencent toujours par des prières.

Qui sait si, dans 5 ans ou 150 ans, un gouvernement ayant la caution (im)morale d’un Charles Taylor, ou d’un disciple aussi grassement rémunéré, décidera de rendra la loi canadienne plus directement conforme aux injonctions célestes, par exemple, en promulguant la nubilité des fillettes âgées de 9 ans, même si, pour l’heure, le droit séculaire est en liberté surveillée? 

Déjà en 2022 (et non pas en 2122), le processus est en bonne voie aux Etats-Unis (un pays toujours à l'avant-garde...), où les ayatollahs de la Southern Baptist Convention et des Assemblies of God ont déjà réussi à considérablement entraver le droit à l’avortement, émulant la police gynécologique du regretté nataliste roumain Nicolae Ceaușescu. La victoire complète semble à portée de la main dès le mois prochain.

Tous les rednecks américains misent, dans leurs ferventes prières, sur un arrêt de la Cour suprême américaine conforme au droit canonique. Ils peuvent compter sur le spectre de feu le Grand Inquisiteur Antonin Scalia pour guider la réflexion des juges.

Gare alors à l'inévitable bombe démographique : on assistera à une incontrôlable infestation d'organismes consanguins.

LP

 

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