Thursday, February 14, 2019

Le chaos gouvernemental en matière d'immigration et de laïcité au Québec.




Le 14 février 2019.

Ce qui rapproche, ce n'est pas la communauté des opinions, c'est la consanguinité des esprits.
- Marcel Proust.

Si le Christ était mort sur une chaise électrique, tous les petits chrétiens porteraient une petite chaise en or autour du cou.
- Serge Gainsbourg.

Le gouvernement Legault présentera bientôt à l'assemblée nationale son projet de loi en matière d'immigration. On laissera aux spécialistes le soin d'en discuter les qualités et… ses probables failles constitutionnelles.

Mais le profane ne peut passer sous silence les 18 000 dossiers de candidature en souffrance, parfois depuis des années, qui seront sommairement jetés à la poubelle. Il y a controverse(s) sur le nombre de personnes concernées et sur leur sort. Au total, avec les familles, parle-t-on d'au moins 50 000 personnes? N'y aurait-il  "que" 5000 personnes concernées résidant déjà au Québec à l'heure actuelle? Etc.

Et il est évoqué le chiffre de 19 millions $ au titre du remboursement des frais engagés pour ces dossiers, tandis que le premier ministre invite les candidats à présenter une nouvelle demande, censée être instruite rapidement, mais selon de nouveaux critères. Si M. Legault a sans doute raison d'expliquer les arriérés par les carences du système instauré par les gouvernements antérieurs, on s'explique mal pourquoi les intéressés devraient maintenant se plier à des critères modifiés et donc être éventuellement pénalisés derechef.

Bref, une lamentable confusion.

Ni lui, ni Simon Jolin-Barrette, son jeune ministre de l'immigration, encore en apprentissage, qui dénoncent vertueusement "une campagne de peur" concoctée par l'opposition, n'ont pensé à la solution la plus simple, la plus rassurante, la moins coûteuse, et la plus avantageuse pour tous : l'approbation immédiate, en bloc, de ces 18 000 dossiers.

L'objectif général d'"arrimage" de l'immigration au marché du travail est incontestablement sain, sans être novateur. Cela dit, surtout vu la situation de pénurie de main d'œuvre que vit le Québec, on peut tenir pour acquis que, de toute manière, statistiquement, la plupart des personnes concernées par ces 18 000 dossiers y répondront. Il tombe sous le sens qu'une mesure collective serait judicieuse selon une analyse coût-bénéfice, sans oublier que le gouvernement ferait ainsi l'économie d'un possible recours… collectif. Le gouvernement québécois pourrait s'inspirer des états qui retiennent, à l'occasion, la solution de l'"amnistie" générale des immigrants illégaux, a fortiori indiquée quand les intéressés se sont toujours conformés à la loi et se retrouvent victimes de l'incurie (fort possiblement illégale) des autorités.

De surcroît, au Québec, une mesure transitoire d'urgence et globale est d'autant plus indiquée qu'elle résultera en une transfusion de sang neuf à la population. Le problème de la consanguinité est toujours d'une cruelle et incontournable actualité, vu le poids de l'histoire : le peuple québécois actuel est issu d'une population longtemps rurale, trop éparse dans une nature hostile, où les familles, pendant des siècles, devaient passer le temps comme elles pouvaient pendant les interminables soirées d'hiver (l'ambiance n'était pas non plus des plus joviales dans les presbytères après la messe). Aujourd'hui, la municipalité d'Hérouxville, le pittoresque ex-maire de Saguenay Jean Tremblay, et le ministre de l'agriculture (rien de moins) André Lamontagne en sont les éloquentes illustrations cliniques, encore que ce dernier échappe à tout soupçon d'intégrisme écologique.

Il serait dommage de rater une aussi belle occasion de procéder à un salutaire "arrimage" génétique, par un simple trait de plume. Cependant, il faut toujours compter avec l'arrogance politique…

Autre incohérence, en matière de laïcité cette fois, outre le maintien du duplessiste crucifix à l'assemblée nationale, le premier ministre annonce que, au nom du patrimoine, il n'est pas question d'obliger les écoles où se trouve encore cette sinistre relique d'un autre âge à la retirer et qu'il est disposé à leur accorder une autonomie de décision sur cette question (faut-il encore rappeler que l'on ne trouve plus beaucoup de swastikas dans les établissements scolaires allemands?), alors qu'il y aura interdiction générale de port des signes religieux chez les enseignants.

Comprenne qui pourra ces jésuitiques ergotages.

LP

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