Wednesday, June 21, 2023

Le Canada et les magistrats félons.

Le 21 juin 2023. 

L’enfer, c’est les autres.
- Jean-Paul Sartre.
 
Il vaut mieux vivre dans la liberté que dans la non-liberté.
- Dimitri Medvedev.

Toutes les sociétés humaines, y compris le Canada, en comptent, mais le côté quantitatif varie, selon l’efficacité des contrepoids juridiques constitués par tel ou tel pays, selon son respect de la notion d’état de droit. On oublie souvent qu’à Nuremberg, furent jugés pour crimes contre l’humanité non seulement des personnalités politiques et militaires , mais aussi des magistrats qui avaient servilement appliqué les lois nazies. 

Le gouvernement canadien vient de prendre une initiative intéressante.

Il impose des sanctions visant sept juges iraniens, au motif qu’ils contribuent aux violations flagrantes et systématiques des droits de la personne dans leur pays en présidant des simulacres de procès, notamment en utilisant des éléments de preuve obtenus sous la torture.

Évidemment, si cette initiative est digne d'éloges, elle est largement symbolique : on imagine mal que les juges en  question aient jamais eu l’intention d’ouvrir à Toronto des fastes foudes ayant du ghormeh sabzi au menu et encore moins qu’ils y aient des actifs à geler. Quant à l’interdiction de territoire dont ils font l’objet, il n’est pas certain que faire découvrir les chutes du Niagara à leur smala figurait dans leurs projets touristiques de vacances estivales. Le gouvernement canadien a pourtant l’occasion de prendre cette mesure de manière très concrète.

Par les temps qui courent, les Canadiens ne sont pas choyés par la “justice” pénale française.

Signalons la touriste canadienne qui fut violée au 36 quai des orfèvres en 2014. Les deux policiers lubriques furent finalement acquittés au bénéfice d’un doute imaginaire en 2022, notamment en dépit de preuves vidéos établissant les mensonges des accusés. Pauvre commissaire Maigret, la blanquette de veau mitonnée avec amour par son épouse lui serait restée sur l’estomac.

Rappelons que le citoyen canadien (mais, pour son malheur, musulman), Hassan Diab, a été victime d’un grotesque simulacre de procès et même de procédure en France, depuis 2013, qui a abouti à sa condamnation par contumace pour l’attentat terroriste contre la synagogue de la rue Copernic, à Paris, en 1980. La cohérence voudrait que fût appliquée la même mesure à tous les magistrats et procureurs français impliqués dans cette longue parodie de justice, même si elle ne s’est pas soldée par une exécution à l’iranienne (comble de la générosité judiciaire gauloise, M. Diab a bénéficié d’une fuite au Canada stratégiquement consentie). Sans oublier surtout le pittoresque “petit policier” aux ordres, Louis Caprioli. Très petit, en effet, minuscule même, vu qu’il feint d’ignorer que le rôle d’un témoin n’est pas de faire état de ses soi-disant “convictions”, mais de s’en tenir aux faits bruts dont il a connaissance personnelle. Sauf avec la bénédiction des juges : les prétoires français sont toujours hantés par les spectres de l’Inquisition.

Cette démarche s’imposerait d’autant plus que les malversations des magistrats français ont eu un effet direct, sur un citoyen canadien, sur le territoire canadien même.

Allons d’ailleurs plus loin. On ne peut qu’encourager M. Diab à porter plainte aux autorités policières canadiennes vu qu’il tombe sous le sens que les participants à la machination dont il est toujours victime ont commis des crimes aux termes de la loi pénale de son pays. Cela dit, vu que ces malfrats en toge ont tous la nationalité française, ils ne seront pas plus extradables que les prêtres en soutane amateurs de chair fraiche canadienne, surtout inuite.

Mais les procureurs canadiens auront-ils alors le coffre de faire leur devoir? La ministre des affaires étrangères Mélanie Joly, qui a pour modèle Clint Eastwood, regardera-t-elle cette fois-ci les Français dans les yeux pour leur dire que ne seront plus tolérées de telles persécutions politico-judiciaires contre les Canadiens?

Les paris sont ouverts.

LP


Sunday, June 4, 2023

Inquiétante censure d’État au Québec.

Le 4 juin 2023.

Consensus universel : l'accord des "on". 
- Raymond Queneau. 
 
Genius abhors consensus because when consensus is reached, thinking stops. Stop nodding your head. 
- Albert Einstein
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La ministre québécoise du Tourisme, Caroline Proulx, a exigé l'annulation d'un événement intitulé « Rallye foi, feu, liberté », orchestré par Harvest Ministries International (organisation basée à Kelowna, en Colombie-Britannique) qui devait avoir lieu du 23 juin au 2 juillet au Centre des congrès de la ville de Québec, au motif que cette activité créait un grand malaise” (sic). Ce congrès s’inscrivait dans une campagne de mobilisation pour mettre fin à l'accès à l'avortement, censé être, selon les organisateurs, symptomatique d’une influence satanique (sic) et du déclin moral radical du Canada (sic).

Selon le pédégé du Centre des congrès, Pierre-Michel Bouchard, “la liberté d’expression, c’est la règle (sic), mais il ajoute, du même souffle (chargé d’acétone) et sans rire : “Dans ce cas-là (sic), comme société d’État (sic), on pense que c’est notre rôle d’adhérer à certaines valeurs (sic) dont le gouvernement fait la promotion (sic)”.

La ministre Proulx a décrété que ce congrès “n'était pas le bienvenu dans une institution gouvernementale (sic)Notre gouvernement est résolument pro-choix. Et c'est un sujet qui fait largement consensus (sic) au Québec... Parce que c'est contre les principes fondamentaux (sic) du Québec... ce type d'événement-là n'aura pas lieu chez nous”.

Ah, mais au fait, quels sont ces principes? “Les principes fondamentaux de l’État, je pense que c'est clair (sic)” dit-elle. Mieux que clair, transparent. La laïcité de l’État en fait-elle partie? Réponse sybilline, mais inspirante de la part, cette fois, du premier ministre : “J’ai donné pendant la campagne électorale là-dessus”. Il ajoute : “On n'ira pas permettre à des groupes antiavortement de pouvoir faire des grands spectacles (sic) dans des organismes publics (sic)”.

L’art de dire tout et son contraire, parfois dans la même phrase. Au Québec, la liberté d’expression est à géométrie très variable.

En l’espèce, les cinéphiles d’un certain âge (et d’un âge certain) auront immédiatement à l’esprit un chef d'oeuvre du 7e art, “Z”, de Costa-Gavras : un député socialiste, peu avant son assassinat, se vit opposer la résiliation unilatérale de la location d’une salle de spectacle où devait se tenir un meeting, suite à des pressions politiques.

Apparemment, la ministre ignore que, dans toutes les sociétés, de nombreuses doctrines, sociales, économiques, politiques, religieuses, fascistes, communistes, (anti)sionistes, etc.. suscitent de grands malaises. Cependant, dans les pays civilisés, elles demeurent audibles. Les délicates victimes du “malaise” frileusement évoqué par la ministre Proulx disposaient d’un remède : ne pas assister à ce congrès et vaquer à leurs occupations. Tout simplement.

Invoquer, une fois de plus, Voltaire serait céder à la facilité d’un cliché en l’occurrence.

Il faut peut-être plutôt recommander à la ministre, et à tous les moutons de Panurge de l’assemblée nationale du Québec, qui a unanimement approuvé le baillonement de Harvest Ministries International (mais qui ne sont nullement offusqués par le “spectacle” de felliniesques “drag queens” dans les bibliothèques pour enfants), la lecture d’une autorité contemporaine incontestable en matière de liberté de droits de l’homme, de liberté de réunion et d’expression : Aryeh Neier.

Cet Américain, d’origine juive allemande, réfugié de l’Allemagne hitlérienne, a notamment défendu en 1977 le droit de groupes néo-nazis à défiler à Skokie, une banlieue de Chicago, comptant de très nombreux survivants de l’holocauste, ce qui était susceptible, en effet, de donner lieu à un certain malaise. L’intervention de la American Civil Liberties Unions (ACLU) triompha des manoeuvres d’obstruction de la part des autorités municipales. Le titre de son récit est aussi concis qu’éloquent : “Defending My Enemy: American Nazis, the Skokie Case, and the Risks of Freedom”,  P. Dutton; First Edition (Feb. 1 1979). On trouvera ce livre, qui stimulera la réflexion encore en gestation des saintes-nitouches et fera accoucher leurs esprits, dans toutes les bonnes bibliothèques de droit, selon la formule consacrée bien française.

Evidemment, au Canada, on est relativement plus timoré dans la défense de la liberté de parole, encore que l’état du droit est nettement meilleur qu’en France. Cependant, on ne peut qu’encourager Harvest Ministries International à s’adresser à la justice et notamment à solliciter une injonction, qui irait de soi aux Etats-Unis, dont la constitution est beaucoup plus voltairienne.

La “liberté de choix”, principe invoqué pieusement par les politiques québécois, doit viser aussi les communications d’idées. C’est une valeur qui protège tout autant le récepteur que l’émetteur. Même, et surtout, le service public doit s’y soumettre totalement, sinon elle est mort-née.

LP