Thursday, January 9, 2020

Les perversions de Gabriel Matzneff et la réactivité de la "justice" française.



Le 9 janvier 2020.

I like young girls.
- Roman Polanski.

Il y a trois décennies, la Québécoise Denise Bombardier était une voix courageuse, mais bien solitaire, pour dénoncer la vermine Matzneff, lors de l'émission "Apostrophe". Ce crâne d'œuf a toujours pu se vanter, en toute impunité, de ses agressions sur mineur(e)s. En effet, il ne faisait pas mystère de sa préférence pour des partenaires plus malléables, qui ne sont pas encore "durci(e)s" (sic) par la vie. Voilà un auteur qui sait trouver le mot juste et qui donne tout son sens à la notion d'ouverture. Mme Bombardier le comparait aux vieux messieurs qui attirent les enfants en leur offrant des bonbons, et, en effet, il avait plus d'un sucre d'orge dans son sac et même des sucettes à l'anis.

L'ineffable Bernard Pivot, qui, en 1990, saluait sur un ton badin le "collectionneur de minettes", relativise la chose en 2019 sous prétexte de l'évolution de la hiérarchisation des exigences littéraires et des injonctions morales. En d'autres termes, si le détournement de mineur était socialement tabou à l'époque, les grands auteurs jouissaient (au sale comme au figuré) d'une dispense. On l'invitera à tout le moins à consulter le Code pénal en vigueur en 1990, qui visait sans ambiguïté les pulsions des Matzneff et autres Roger Peyrefitte. Au risque d'un anachronisme, on pourrait dire que, en matière de consentement sexuel, les textes légaux signalaient depuis des lustres les âges pivots pertinents et invitaient les consommateurs de chair fraîche au retrait de certaines avancées malsaines.

Il a fallu la publication de "Consentement" par une victime, Vanessa Springora, pour que la "justice" française se réveillât et se penchât sur le problème et le prît en mains, au lieu de lui tourner le dos. Mme Bombardier dénonce la "lâcheté" du système judiciaire français (grâce à elle, on comprend peut-être un peu mieux la pittoresque expression québécoise "maudits Français"). Mais que voulez-vous? Les enquêteurs et juges d'instruction n'ont pas que ça à faire : quand on a les mains pleines avec les criminels imaginaires d'Outreau et qu'on consacre ses énergies - et les fonds public -, à s'acharner sur les Jacqueline Sauvage, on n'a pas de temps à perdre avec des adolescent(e)s avalant des couleuvres. Il est impossible d'être à la fois au champ et au moulin, et les collègues tellement instruits de Fabrice Burgaud ont d'autres félin(e)s à fouetter. Comment ne pas penser à Donald Trump qui se vante de pouvoir impunément assassiner n'importe qui sur la 5e avenue?

Il ne faut donc pas trop espérer de la mascarade qu'est l’enquête ouverte pour « viols commis sur mineurs » par le parquet de Paris : vu l'âge canonique de l'intéressé, ses ultimes remontées et giclements de sève authentifiés sont fort probablement largement couverts par la prescription pénale ("Dieu merci", pour citer le primat des Gaules, le cardinal Barbarin) et les autres relèvent de ses fantasmes nostalgiques.

Par ailleurs, que dire de la suspension de la commercialisation des œuvres du sodomite par Gallimard? A lui de vérifier les conditions de son contrat d'édition. Mais vu que les Français sont des veaux (dixit un certain général), on pense que des gestes symboliques occulteront la bien gauloise crapulerie, commerciale et judiciaire. Pire que de la poudre aux yeux... Idem en ce qui concerne le retrait, au Canada, de ses livres par la bibliothèque et archives nationales du Québec. Outre l'illégalité de cette mesure, il faut être un faible d'esprit pour s'imaginer que la censure, les index librorum prohibitorum règlent quoi que ce soit. Au contraire, il faut encourager tous les malfrats à publier leurs prouesses, car leurs informations peuvent faciliter la tâche des enquêteurs... qui ne sont pas des pantins.

On notera que si le satyre a encaissé 160 000 euros en 20 ans, au titre de l'allocation accordée par le Centre national du livre aux écrivains "démunis", elle est maintenant supprimée. Il faut croire que le stupre visqueux ne nourrit pas toujours adéquatement son psychopathe, fût-il français. C'est une consolation.
Le ministre de la Culture, Franck Riester, propose maintenant le réexamen des décorations remises à Gabriel Matzneff, officier des Arts et Lettres depuis 1995 et chevalier de l’Ordre national du mérite depuis 1998, lors des prochaines réunions des organismes qui les attribuent.

Un châtiment exemplaire et surtout dissuasif.

LP

Friday, January 3, 2020

Carlos Ghosn : Escape from Alcatraz?



Le 3 janvier 2020.

I am not a number, I am a free man!
- Patrick McGoohan (Le no 6 dans "The prisoner").

Les évasions/exfiltrations spectaculaires captent toujours l'attention du grand public et se traduisent parfois par de bons scénarios haulivoudiens (mais pas toujours fidèles à la réalité historique).

Pour mémoire, et dans le désordre, il y eut, par exemple : les Américains sauvés par les diplomates canadiens en Iran lors de la révolution khomeniste de 1979; "El Chapo"; l'affaire des "vedettes de Cherbourg" (subtilisation pendant les fêtes de Noel 1969 de vedettes militaires achetées par Israël, et détenues illégalement par la France); Henri Charrière dit "Papillon" (dont l'évasion finale du bagne de Cayenne était imaginaire, mais poétiquement racontée par l'auteur). N'oublions pas Jacques Mesrine, qui s'est illustré tant au Canada qu'en France; Billy Hays (le film "Midnight Express" comportait des éléments de grossière propagande, notamment une évasion complètement fantaisiste). Enfin, en 1961, il y eut la capture du nazi Adolf Eichmann par les Israéliens en Argentine; évidemment, vu la réticence de l'intéressé, on ne saurait parler au sens strict d'"exfiltration", plutôt de… "transfèrement" clandestin, lequel comportait d'ailleurs les mêmes difficultés logistiques que la cavale de Carlos Ghosn, contrairement à celle de Roman Polanski qui, en 1978, prit simplement le premier avion pour l'Europe la veille de son face-à-face avec un juge vindicatif se croyant au-dessus des règles.

Alors, quid de l'ex-pédégé, et sauveur, de Nissan?

On peut penser qu'il a, au départ, en se rendant au pays du soleil levant, commis une grossière erreur, similaire à celle du réalisateur de "Rosemary's baby" qui eut la folle imprudence de quitter le giron français pour se rendre en Suisse en 2009.

Cela dit, il dénonce : un système judiciaire fondé sur la présomption de culpabilité et sur la religion de l'aveu; un complot politique entre des parties privées et des procureurs s'accordant généreusement une grande marge de manœuvre; des manipulations de témoins; des conditions d'incarcération provisoire que l'on pourrait euphémistiquement qualifier de... frugales; bref, une atmosphère dont la convivialité laisse à désirer, surtout en matière d'interventions des avocats de la défense, conçue pour briser le suspect. [Spoille-leurre aleurrete] : non, on ne parle pas de la France en l'occurrence, mais du Japon; cependant, vu le déroulement de la procédure en cause, le réflexe pavlovien de l'observateur objectif est de tenir pour acquis que le magistrat Fabrice Burgaud, qui s'est illustré à Outreau, est intervenu à titre de conseiller technique détaché par la Cour de cassation française au ministère public japonais, mais seule la barrière de la langue réfute cette déduction de bon sens.]

Que l'homme d'affaires multimillionnaire qui se marie dans un faste royal au palais de Versailles ne soit peut-être pas le plus altruiste des philanthropes est une chose, mais, partout dans le monde, la présomption d'innocence et les droits de la défense sont (ou plutôt devraient être) tabous, l'instrumentalisation et les détournements du Code de procédure pénale une hérésie. Sous réserve des révélations à suivre, chacun se forgera, en toute indépendance intellectuelle, son propre jugement quant au dossier particulier et au système judiciaire nippon en général, mais, en l'état, on ne peut que féliciter M. Ghosn d'avoir ridiculisé les autorités japonaises par le pied-de-nez que constitue son opération magistralement réussie et ainsi d'avoir mis les rieurs de son côté. (En l'espèce, on a même du mal à résister à la métaphore gestuelle plus coquine consistant en un mouvement digital). Evidemment, ses horizons touristiques sont dorénavant plus circonscrits…

Les fonctionnaires du Mikado ont toujours l'option du harakiri, mais sur ce plan, le bon vivant et honorable Burgaud ne leur sera d'aucun secours technique ni spirituel.

LP